Le monde juif

Résumé Fr

Comme de nos jours, au Moyen Âge les prénoms des juifs ont varié d'un endroit à l'autre. Des listes nominatives de centaines de noms, voire de milliers, ont été établies aussi bien par des savants modernes que par les gens du Moyen Âge eux-mêmes. L'une des originalités de cette anthroponymie juive réside dans le fait que les hommes juifs ont porté deux séries de noms, l'une, hébraïque, pour la synagogue, l'autre, romane ou germanique, pour la vie de la cité. Les femmes juives, par contre, ne font pas toujours partie de cette onomastique à deux vitesses : beaucoup d'entre elles portent des noms d'origine non hébraïque. La question des noms non hébraïques portés par les juifs a été discutée au siècle dernier par deux savants importants, Leopold Zunz et Moritz Steinchneider. En examinant leurs découvertes et en comptant sur bien d'autres travaux récents, on ar- rive à établir trois faits principaux, à savoir : a) qu'il y avait un arsenal de noms où puisaient les chrétiens et les juifs simultanément ; b) que bien d'autres noms romans ont été employés seulement par des juifs ; c) qu'un stock important de noms a été réservé à l'usage exclusif des chrétiens. Ainsi on découvre un fossé onomastique bien tranché séparant les juifs de leur environnement. La dernière partie de l'article présente les trouvailles de I. Krackawer, qui a publié déjà en 1911 une étude sur l'onomastique juive à Francfort-sur-le-Main au Moyen Âge. La problématique que cette étude a évoquée et les méthodes statistiques employées serviront de modèle aux futurs chercheurs de l'onomastique juive.