10 décembre 2018
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Michele Bellotti, « Un livre jamais paru ? Le manuscrit Riccardiano 2354 et l’héritage épistolaire de Giorgio Vasari », Theses.fr, ID : 10670/1.8h2t6e
Précieuse source d’informations sur l’auteur des Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, la correspondance de Giorgio Vasari (1511-1574) est bien connue des historiens de l’art depuis son édition par Karl Frey (1923-1930). La conservation rigoureuse de ses nombreuses lettres ainsi que la remarquable qualité stylistique d’une grande partie d’entre elles, invitent à s’interroger sur la valeur que Vasari lui-même pouvait attribuer à son écriture épistolaire. Voyait-il ses lettres comme une partie fondamentale de son legs culturel ? On peut se demander s’il avait pu caresser le projet de les publier sous forme de recueil, conformément à une pratique très diffusée chez les hommes doctes du XVIe siècle. C’est justement un recueil qui se distingue tout particulièrement au sein du riche carteggio vasarien : le manuscrit Riccardiano 2354, de la Bibliothèque Riccardiana de Florence. Datant de la fin du XVIe siècle, ce petit codex contient quarante-huit missives copiées par le neveu et principal hériter de l’artiste arétin, Giorgio Vasari le Jeune (1562-1625), fonctionnaire médicéen versé dans différents savoirs techniques et scientifiques. Cette étude analyse les opérations de sélection, de transcription et de possible transformation menées par Vasari le Jeune à partir des sources épistolaires originales de son oncle, aujourd’hui introuvables. Des indices matériels et textuels laissent penser que le volume de la Riccardiana pourrait avoir été conçu comme un « livre de lettres » destiné à la publication, mais finalement jamais paru. Une initiative éditoriale avortée donc, visant la célébration posthume de la vie et de l’œuvre de Vasari à travers la valorisation de son héritage épistolaire. La lecture croisée des textes du recueil et d’autres missives qui y furent exclues, permet de reconnaître, en amont de l’entreprise de Giorgio le Jeune, un dessein de reconstitution biographique qui privilégie certains aspects de la figure de Vasari, en omet d’autres et, parfois, plie l’héritage culturel de l’artiste aux exigences d’affirmation personnelle du neveu dans le contexte médicéen de son temps. La résultante principale de cette recherche est une réflexion sur les dynamiques propres à l’écriture épistolaire de Vasari, sur les fonctions diverses qu’elle pouvait endosser dans les différentes phases de sa carrière d’artiste et d’écrivain. Car la pratique épistolaire fut pour Vasari un outil privilégié pour la mise en représentation de soi vis-à-vis de son réseau de correspondants, pour l’apprentissage de la parole littéraire et pour l’élaboration des procédés de l’ekphrasis, plus largement développés dans les Vies.