L’Éros mimétique mis à nu par ses adeptes mêmes. Marcel Duchamp éclairé par Bourdieu et Girard, à moins que ce ne soit l’inverse

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Marcel Duchamp, en fomentant une véritable expérience sociologique grandeur nature autour de sa fameuse pissotière, a dévoilé le motif refusé par les uns, donc réhabilité par les autres comme moteur de l’art avant-gardiste. Ce qui n’étonnera pas les lecteurs de Pierre Bourdieu, qui en arrive, des années plus tard, aux mêmes observations afin d’étayer sa distinction. Mais il est plus remarquable que ce motif se retrouve aussi dans la théorie anthropologique de René Girard en tant que sécularisation du motif chrétien par excellence : sacrifié par les uns, donc sacralisé par les autres. La présence de ce motif au cœur de la modernité permet d’éclairer la critique de la lecture sacrificielle du christianisme historique entamée par Girard et ainsi montrer en quoi cette lecture chrétienne aboutit à l’indignation comme manière de se défausser de ses responsabilités, comme méconnaissance.

Michel Duchamp, while inciting a veritable sociological experiment around his famous public urinal, unmasks the credo “refused by one, thus rehabilitated by others” as an engine of avant-garde art. What does not surprise the readers of Pierre Bourdieu, who arrived at the same observations, though many years later, supporting his distinction. However, it is more remarkable to also find this credo in the anthropological theory of René Girard in relation to the securalization of the Christian credo par excellence: sacrificed by one, sanctified by the others.” The presence of this credo at the heart of modernity clarifies the critique of “la lecture sacrificielle du christianisme historique” explored by Girard as well as showing how this christian reading leads to indignation as a way of discarding ones’ responsabilities, like ignorance.