2019
Cairn
Emmanuel Decaux, « Coup d’arrêt à Bakou : (obs. sous Cour eur. dr. h., Gde Ch., arrêt rendu dans le cadre de la « Procédure fondée sur l’article 46, § 4, dans l’affaire Ilgar Mammadov c. Azerbaïdjan », 29 mai 2019) », Revue trimestrielle des droits de l'Homme, ID : 10670/1.91i9uv
La mise en œuvre de l’article 46, § 4, de la Convention européenne des droits de l’homme a été déclenchée pour la première fois par le Comité des Ministres à l’encontre de l’Azerbaïdjan, dans l’affaire Ilgar Mammadov qui avait déjà donné lieu à deux arrêts de chambre en 2014 et en 2017. Dans le premier arrêt, la Cour avait constaté des violations de l’article 5 de la Convention, combiné avec l’article 18 sur le « détournement de pouvoir ». Dans la seconde affaire, la Cour a conclu à des violations de l’article 6 de la Convention, sans pouvoir se prononcer sur l’article 18. Après une série de résolutions intérimaires demandant en vain la « libération immédiate et inconditionnelle » de M. Mammadov, le Comité des Ministres a fini par saisir la Cour en décembre 2017. L’arrêt de la Grande Chambre éclaire les défis rencontrés par la Cour et le Comité des Ministres en matière de suivi de l’exécution des arrêts, insistant sur l’obligation de « bonne foi » qui incombe aux États dans le cadre des principes généraux de la responsabilité internationale. Mais ce « recours en manquement » trouve toutes ses limites dans la discontinuité des deux contentieux s’agissant d’une violation continue. Derrière l’unanimité de façade de la Grande Chambre, c’est la cohérence juridique du système de la Convention qui se trouve mise en question.