2025
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Olivier de Cazanove, « Palikoi, Mefitis : lieux de culte auprès de mofettes (mais pas seulement) », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.993076...
Les anciens lieux de culte des Palikoi en Sicile et de Mefitis en Hirpinie, mentionnés dans la littérature savante moderne à partir des xvie et xviie siècles, puis visités par les voyageurs au cours des siècles suivants, présentent des caractéristiques naturelles similaires et remarquables qui nous invitent à les étudier en parallèle : il s'agit dans les deux cas de mofettes au sens géologique du terme, c'est-à-dire d'émanations de gaz pestilentiels, principalement du dioxyde de carbone, qui ici, comme c'est souvent le cas, se déversent dans de petits lacs. Ce paysage paravolcanique détermine la topographie des deux lieux de culte et, dans une certaine mesure, le rituel. Il existe cependant une différence importante entre les deux : alors que les frères Palikoi sont des dieux purement topiques attachés aux lacs de Naftia, Mefitis est attestée ailleurs que dans son domaine sulfureux d'Ampsanctus. On la retrouve ailleurs en Hirpinie, mais aussi en Lucanie, jusqu'à Rome et même en Italie du Nord, dans une série de lieux de cultequi, quoi qu'on en ait parfois dit, n'ont aucune des caractéristiques naturelles de celui d'Ansanto, même si pour Virgile et ses anciens commentateurs, « Mephitis est proprement la puanteur de la terre, qui naît des eaux sulfureuses » (Serv., ad Aen., VII, 81). Il faut donc supposer que cette « identité gazeuse » de la divinité ne convient qu'à la Mefitis du ravin d'Ansanto, dans ce qui constitue l'épicentre de son culte, alors qu'en se déplaçant vers de nouveaux sanctuaires, la déesse acquiert progressivement une physionomie en partie différente, notamment dans ses bois sacrés de Rossano di Vaglio et de Rome. De plus, la diffusion du culte reste limitée : il faut se garder de tomber dans un pan-méfitisme qui consisterait, comme on l'a trop souvent fait, à attribuer à la déesse n'importe quel lieu de culte du domaine osque. Néanmoins, les caractéristiques premières de la déesse d'Ansanto ne sont pas oubliées. Virgile décrit le ravin d'Ampsanctus comme une bouche d'Hadès (d'où Mefitis est apparemment absente) et,inversement, la source latine d'Albunea comme des eaux méphitiques.