2015
Cairn
Samer Ghamroun, « Effets d'état : Mobilisations et action publique au Liban à l'épreuve du pluralisme juridique », Gouvernement et action publique, ID : 10670/1.9a4ryn
Malgré un format institutionnel classique, l’État libanais ne présente pas la plupart des propriétés par lesquelles la sociologie politique caractérise le pouvoir étatique. Il figure ainsi régulièrement dans la liste des États faibles ou même en échec. Cet article remet en question la pertinence de cette qualification en comparant trois mobilisations de droits qui se sont déroulées au Liban ces dix dernières années (protection de l’enfant en danger, protection des femmes victimes de violences familiales, augmentation de l’âge de garde de l’enfant en faveur de la mère dans la communauté sunnite). Ces mobilisations ont eu lieu dans le domaine du droit de la famille où l’État n’a jamais mis en œuvre des politiques publiques centrales, laissant à chaque communauté religieuse une autonomie juridique et judiciaire importante. Ce travail conteste cette absence étatique présupposée en étudiant des transformations et des outputs inexplicables par le simple rapport de force entre acteurs des mobilisations et contre mobilisations. Ces effets d’État ne passent pas par les éléments traditionnels recherchés par la sociologie de l’action publique : des budgets, une bureaucratie, des règles centrales obligatoires. Il s’agit ici de formes originales d’étatisation par concurrence, par standardisation ou par synthèse entre aspirations juridiques opposées difficilement conciliables en dehors des institutions centrales.