30 mai 2016
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Clément Paris et al., « Les gisements gravettiens d’Amiens-Renancourt 1 et 2 (Somme, France) : premières données palethnologiques », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.9b6c36...
Dans la région des Hauts-de-France, les quelques rares gisements du Paléolithique supérieur ancien connus jusqu’à une date récente ont pâti d’un déficit ou d’une insuffisance de données. Seul le site de Renancourt-lès-Amiens, fouillé en 1910 par Victor Commont, bénéficie d’un contexte stratigraphique fiable et d’un mobilier conséquent, et a été sans équivoque rattaché à cette période. Après le décès prématuré de Victor Commont en1918, la documentation et le matériel archéologique ont été malheureusement égarés, empêchant toute nouvelle étude sur ce gisement particulièrement essentiel pour la connaissance du Paléolithique supérieur régional. En 1996, mais surtout depuis 2010, plusieurs opérations d’archéologie préventive ont permis de sonder à nouveau le quartier de Renancourt, situé à l’ouest d’Amiens. Deux gisements attribuables au Gravettien ont été mis au jour lors de ces nouvelles investigations. Spatialement et chronologiquement distincts, ils sont tous deux très bien conservés dans des séquences loessiques particulièrement dilatées. Ils sont localisés de part et d’autre d’un promontoire limoneux et dominent de quelques mètres les vallées environnantes. Un talus crayeux situé à proximité offre à la fois une protection contre les vents et une acquisition aisée de rognons de silex debonne qualité. Les deux gisements gravettiens, séparés dans le temps par plusieurs millénaires, présentent une organisation spatiale très différente qui traduit à la fois une fonction des sites et des activités distinctes. Le gisement le plus ancien, Amiens-Renancourt 2 (daté de 28000 BP non cal.), a été fouillé sur 1 800 m2 par l’INRAP dans le cadre de deux fouilles préventives. L’étendue du site, reconnue par différents sondages, est d’environ 5 000 m2. Le niveau archéologique se caractérise par de petites concentrations ou amas de vestiges lithiques et fauniques. L’étude du mobilier, ainsi que l’analyse spatiale, mettent en évidence un site aux activités spécialisées, tournées essentiellement vers la boucherie et l’acquisition de matières premières siliceuses. L’absence ou le faible nombre de certaines catégories de témoins lithiques (nucléus, lames, outils) indique vraisemblablement des emports en dehors de la zone fouillée. Parmi les vestiges fauniques, les os de membres de renne, de cheval et dans une moindre mesure de bison sont surreprésentés. Ces observations archéozoologiques associées aux résultats de l’étude tracéologique évoquent un apport spécifique de morceaux de carcasses riches en viande qui ont ensuite été découpés sur place à l’aide de lames brutes. Le gisement d’Amiens-Renancourt 1, daté de 23000 BP non cal., se présente sous la forme d’une importante concentration de vestiges lithiques et osseux située à proximité immédiate des fouilles réalisées par Victor Commont. Cette occupation archéologique fait l’objet de campagnes de fouilles programmées annuelles depuis 2013. La surface étudiée à ce jour est relativement limitée (41 m2) et son extension reste à déterminer précisément. Bien que très partiellement reconnue, l’organisation spatiale donne l’image d’une occupation aux activités variées : taille de silex, traitement de carcasses de cheval et témoignages indirects d’un espace de combustion pas encore localisé. Plus singulièrement, une probable production in situ de statuettes féminines et de parures en craie évoque certains sites gravettiens d’Europe centrale et orientale (Kostienki 1 ou Dolni Vestonice par exemple) aux statuts particuliers. L’ensemble de ces données traduit de manière évidente une occupation plus longue dans le temps, sans doute saisonnière, à l’inverse du gisement gravettien ancien d’Amiens-Renancourt 2.