15 mars 2019
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Aline Santin, « De l'urgence ou le mouvement de la rencontre », HAL-SHS : philosophie, ID : 10670/1.9wtsd3
La médecine d'urgence, discipline de structuration récente, a un rôle majeur dans le maillage sanitaire français. Par ses missions primordiales, ni son rôle, ni sa place ne sauraient être aujourd’hui remis en cause. Toutefois, nombre de contingences interfèrent avec la pratique, modifiant voire perturbant l’exercice. Aussi les compétences des soignants doivent-elles être adaptées aux demandes, et adaptables, tant les conditions d’exercice s’avèrent variables. Aller à la rencontre de la personne à soigner est à la fois indispensable et aléatoire, comme soumise au hasard, semblant parfois échapper. Le fait de rencontrer l’autre relèverait-il de l’illusion, de l’irruption fortuite, ou devrait-il s’intégrer comme une mission, voire une responsabilité à part entière de cette médecine à la temporalité brève ? Le questionnement éthique ainsi dégagé, l’expérience personnelle en tant qu’urgentiste a constitué le socle de cette recherche. Au cours de notre réflexion, des sources philosophiques, sociologiques, romanesques nous ont permis de soutenir et d’illustrer le propos. L’analyse concrète et factuelle des paramètres généraux de la médecine d’urgence intra-hospitalière s’est avérée incontournable, afin d’en percevoir l’impact potentiel sur ce que nous appelons la rencontre. Au fil de cette étude, la perspective de la rencontre ne pouvait s’envisager que dans une autre voie : s’extraire du fatalisme inhérent aux conditions de l’exercice d’urgentiste, s’écarter du déroulé des soins.Ce basculement éthique s’est imposé ayant pour effet de se réapproprier le soin à l’autre et ainsi de replacer la question de la véritable rencontre dans une perspective éthique. L’intersubjectivité entre le malade et le soignant, en urgence et aux urgences, oblige le soignant à se questionner sur sa propre fonction. Dans ce cadre, la dimension de l’utile devient un possible vecteur de la rencontre, comme support éthique à part entière. Le soignant serait-il utile du seul fait de son métier, de son action et/ou en lui-même ? Enfin, le mouvement irréfragable vers l’autre en tant que personne à soigner, impose une sorte de transcendance que concrétise la promesse. Au-delà du contrat initial qu’est la promesse des meilleurs soins, une sorte de nouvelle promesse a fait jour : se promettre avant tout d’aller à la rencontre de l’autre comme premier mouvement. Cet engagement émerge comme la condition première, même et surtout en urgence, permettant de se réaliser comme soignant et d’être au cœur de sa fonction.