21 février 2022
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Sébastien Ledoux, « Peut-on encore parler de "devoir d'oubli"? », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10.35923/qr.09.01.03
Dans sa réflexion sur la mémoire et l’oubli, Paul Ricœur soulevait la question des « abus de mémoire » en relevant des usages pervers du « devoir de mémoire » par la frénésie commémorative ou la manipulation de la mémoire. Le philosophe défendait ainsi un « devoir d’oubli » qu’il jugeait nécessaire pour l’accomplissement d’une « juste mémoire ». Nous proposons dans notre texte de parcourir cette notion de « devoir d’oubli » à travers l’histoire. Des politiques d’oubli ont été menées par les États par amnistie/amnésie pour reconsolider la société. De l’Antiquité (« damnatio memoriae »), à l’époque moderne (Edit de Nantes de 1598 sur les guerres civiles de religion) et contemporaine (loi espagnole de 1977 sur la guerre civile), il existe une tradition politique de devoir d’oubli où l’oubli est apprécié comme un facteur de réparation sociale. A partir de la fin du 20e siècle, de nouveaux discours et de nouvelles pratiques dénoncent l’oubli d’événements violents comme un facteur de destruction des communautés humaines. Ce nouveau statut international de l’oubli intervient dans un nouveau paradigme du rapport des sociétés à leur passé qui situent la mémorialisation des passés violents comme un remède incontournable aux désordres individuels et collectifs, et comme la condition de la continuité de la collectivité humaine