2009
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Luce Pietri et al., « Les lettres d’Avit de Vienne. La correspondance d’un évêque «politique» », MOM Éditions (documents), ID : 10670/1.a74d0e...
De la correspondance échangée par Avit de Vienne (évêque avant 494‑ février 518), sont parvenues jusqu’à nous une centaine de lettres, toutes postérieures à l’année 500. Tranchant avec celles des épistoliers gaulois contemporains, ces missives reflètent concrètement l’image d’un monde politiquement et religieusement divisé. C’est qu’adressées à des correspondants haut et bien placés dans tous les royaumes d’Occident aussi bien que dans l’Empire d’Orient, elles constituent, pour la majorité d’entre elles, les moyens grâce auxquels l’évêque de Vienne s’efforce, au service de l’Église, tantôt de recueillir des informations, tantôt, à la lumière de celles-ci, d’infléchir, autant que faire ce peut, par ses directives, ses conseils ou ses prières, le cours d’événements trop souvent désastreux à ses yeux. Cette stratégie épistolaire a été menée tout d’abord au sein du royaume burgonde dans lequel Avit, ayant réussi à se tailler la position d’une sorte de primat, devient l’interlocuteur privilégié du roi Gondebaud, puis du catholique Sigismond ; il contribue finalement à la conversion sans heurt des Burgondes à la foi nicéenne. Rêvant aussi du triomphe de celle-ci dans l’univers tout entier, Avit, dans le cadre de l’Occident, reste, malgré la victoire de Clovis sur Alaric II et son baptême, préoccupé par les ambitions du puissant souverain amale Théodoric, adepte de l’arianisme. Dans ses rapports avec l’Empire, le Viennois, notamment dans la correspondance diplomatique qu’il rédige au nom de Sigismond, travaille à un rapprochement politique avec l’Orient, qui doit permettre de mettre fin au schisme d’Acace, une réconciliation qu’il appelle de tous ses vœux mais qui se réalisera seulement quelques mois après sa mort. Certes Avit n’a pas tout su ni tout compris des problèmes contemporains, mais il s’y est efforcé avec une belle constance. Sa correspondance témoigne de l’ampleur de ses vues, de sa perspicacité dans l’analyse de l’échiquier politique et de sa capacité à concevoir une stratégie adaptée à l’évolution de la conjoncture : toutes qualités qui sont assurément celles d’un esprit politique avisé.