2024
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Antoine Nowakowski et al., « Dehlingen (Bas-Rhin) : 3e campagne de fouille programmée de la cour rustique de la villa romaine du Gurtelbach », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.a9c15c...
Les fouilles qui ont eu lieu depuis 2022 sur la villa du Gurtelbach à Dehlingen (Bas-Rhin) se sont concentrées sur les espaces non bâtis de la pars rustica, dont un des bâtiments (le bâtiment B) a été entièrement fouillé entre 2016 et 2019. Environ 220 m2 (zone 3) ont été ouverts et divisés en trois secteurs (secteurs 32, 33 et 34). Cette opération triennale marque le début d’une étude approfondie de la cour rustique de la villa puisqu’une demande de fouille a été faite pour continuer les investigations sur la zone 3 et étendre la fouille vers l’ouest, en direction du bâtiment C. Rappelons également que le site archéologique de Dehlingen est un chantier de fouille ouvert au public, aux scolaires et aux étudiants, notamment de l’université de Strasbourg. Cela étant et afin de pérenniser les méthodes mises en place depuis 1993, date du début des opérations sur le site, chaque seau de terre a été tamisé. Cette opération a permis de récolter par exemple des petits flans de frappe et ainsi ne pas perdre d’informations archéologiques. Il faut retenir de la fouille de 2024, la reconnaissance de la succession de six phases dans l’emprise de la zone 3, plus une phase initiale composée de niveaux argileux qui reposent sur le substrat ne contenant aucun élément anthropique. Au cours de cette troisième campagne de fouille, le substrat a été atteint dans presque tous les secteurs et la majorité des structures vues en 2022 et 2023 a été fouillée. La fouille de 2024 s’est concentrée tout d’abord sur le secteur 33. La première phase, datée par comparaison avec les fouilles du bâtiment B d’avant le Ier s. ap. J.-C., regroupe sept structures en creux, dont cinq trous de poteau, une fosse et un fossé. Un fait fossoyé surmonté de dalles de calcaire (F23) a été fouillé et rattaché à un autre fossé (F18.2), en complément des analyses paléoparasitologiques et biomoléculaires ont prouvé une pollution fécale de la structure. La deuxième phase se marque par l’édification de deux bâtiments B1.1 et B1.2, dans le courant de la deuxième moitié du Ier s. ap. J.-C., MR24 découvert cette année complète les alignements de B1.1. On peut rattacher les murs MR14, MR25, MR17 et MR21 à un deuxième bâtiment (B1.2), malgré un hiatus causé par l’installation des pavillons. L’espace interne de B1.2 a révélé des lambeaux d’un sol en terre battue. Également, cet espace présente 6 trous de poteaux avec un mobilier indigent. Il reste délicat pour l’instant de savoir la fonction et la contemporanéité des deux bâtiments. Pour répondre à cela, la campagne de 2025 aura pour objectif de sonder MR24 et MR25. Dans le secteur 34, trois murs MR21, MR22 et MR23 encadrent un espace dallé d’environ 10 m2 qui fonctionne en même temps que les B1. La phase 3 voit l’arasement des bâtiments B1 et la construction de B2a à la fin du Ier s. ap. J.-C. Un premier niveau de sol empierré de la cour et en terre est reconnu entre MR1 (mur de séparation entre les deux cours de la villa) et MR4 (long mur de façade de B2) associé à un bac à chaux qui a certainement fonctionné lors de l’élévation desdits murs. Il faut également noter la présence d’un fossé (F3) perpendiculaire à l’extrémité ouest de MR1. Très arasée, cette structure est difficile à interpréter, mais il pourrait s’agir d’un élément constitutif d’un porche permettant de passer entre la pars urbana et la pars rustica. La phase suivante (phase 4/5) correspond à l’adjonction des deux pavillons (P4 et P5) à la grange formant ainsi le bâtiment B2b. Elle intervient entre la fin du Ier et le début du IIe s. ap. J.-C. Dans les secteurs 33 et 34, deux chemins F25 (chemin central de la cour) et F26 (chemin desservant B2b) ont été mis au jour en 2023. Le Fait 26 a été entièrement fouillé cette année, quant à F25 la décision a été prise d’attendre son dégagement dans la zone 4. Déjà soupçonné, le porche d’entrée du bâtiment B2b, d’une envergure de 2,5 m de large, a été repéré grâce à des vues zénithales régulières et la découverte de dalles planes. Il est difficile de dater ces structures qui fonctionnent durant tout le Haut-Empire et une partie du Bas-Empire, en même temps que la grange. La phase 6 rassemble les dernières occupations de la pars rustica, puis le déclin de l’habitat puisqu’elle regroupe, entre autres, les unités stratigraphiques de démolition des murs observés notamment dans le secteur 32. La datation de ces couches est délicate à appréhender finement et nous nous contenterons de donner une fourchette chronologique large entre le troisième quart du IIIe s. et le début du Ve s ap. J.-C. Une fosse (F7) et un trou de poteau (F6) sont également à souligner dans cette phase. Enfin, la dernière étape relevée cette année est le recouvrement sédimentaire de la zone 3 avec en plus des perturbations sous forme de fosses attribuables à des réseaux racinaires d’arbres ou d’arbustes, ou bien encore une potentielle tranchée réalisée par Jean Ringel au XIXe s. Notons que dans les couches supérieures, plusieurs flans de frappe et des bâtonnets en alliage cuivreux viennent compléter les éléments découverts les années précédentes sur l’atelier de monnaies de substitution installé dans le bâtiment B. Ces trois années ont permis la découverte de plusieurs déchets d’activités du feu. Il est prévu avant la fin de la triennale de contacter un ou une spécialiste en paléométallurgie afin d’en faire la lumière. Par ailleurs, cette année a été l’occasion de lier l’opération à un stage de géoarchéologie (Responsables : Antonin Nüsslein, Claire Rambeau et Gilles Rixhon). Des étudiants de l’université de Strasbourg ont pu procéder à des carottages sur site et l’analyse d’une coupe stratigraphique de l’une des terrasses d’installation de la villa.