2023
Cairn
Thierry Dufrêne, « « La connexion réseau a été perdue » Essai sur la représentation et l’imaginaire des mondes virtuels : « Si tous les êtres devenaient fumée, les narines les discerneraient », Héraclite », Annales des Mines - Enjeux numériques, ID : 10670/1.aigoby
En 1940, Adolfo Bioy Casarès concevait dans L’Invention de Morel (1940) le plus convaincant des « mondes virtuels » de notre ère contemporaine. Au cours des années 1960-1970, à la rencontre de l’aventure spatiale lunaire, du développement des mass media, des utopies de la jeunesse et du psychédélisme, la science-fiction – Wells, Asimov et K. Dick – imagine à son tour des « mondes virtuels ». Dans la décennie suivante, après l’hyperréalisme dans les arts visuels, la simulation et la séduction du faux ( fake) passionnent les chercheurs et les artistes tout autant que les ingénieurs. Avec Internet, les « mondes virtuels » sont devenus la norme des interfaces homme-machine et des réseaux informatiques. L’interactivité (multi-joueurs) et la simulation offrent à ces mondes ce qu’Étienne Souriau appelait en 1943 une « possibilité absolue » : un imaginaire de la connexion est né. Cet article pose la question d’un nouveau pacte d’extension anthropologique où l’humain s’émule à son double et à ceux du monde. Mais lorsque les dispositifs immersifs et les interfaces (lunettes 3D et gants haptiques) seront remplacés par des greffes à même le corps humain, comme l’augure le transhumanisme, de quoi sera porteuse la rencontre de l’actuel et du virtuel ?