Visages performés et doublures d'altérité

Résumé Fr

Cet article se propose de mettre en tension de manière transhistorique des œuvres qui cherchent à déjouer la signalétique du visage en faisant dévier le profil de l’identité (notamment par la grimace considérée comme un masque autoplastique), et d’autres productions artistiques contemporaines critiques à l’égard des finalités identificatoires des recherches scientifiques liées au dévoilement et à la reconstitution de la cartographie du « véritable » visage. Ces deux voies distinctes de la représentation du visage seront abordées conjointement afin d’articuler les notions d’identité, d’altérité et de masque. A l’aune de cette problématique seront ainsi questionnées les Face-farces (1968-1974) de l’artiste autrichien Arnulf Rainer, jouant de la défiguration et de dés-identification afin de déloger ses autres visages. Des filiations avec les autoportraits grimaçants sculptés du sculpteur baroque autrichien Franz Xaver Messerschmidt, mais aussi avec les autoportraits dessinés du français Jean-Jacques Lequeu (fin du XVIII° siècle) seront précisées. De manière dialectique, d’autres masques seront étudiés : les portraits étrangement orthonormés que fait imprimer en 3D l’artiste américaine Heather Dewey- Hagborg. Ces visages « neutralisés » et indemnes de toute dérive faciale sont d’autres visages de l’altérité, produits en l’absence même de leurs modèles (à partir de prélèvements ADN d’inconnus). Comment des visages autres peuvent-ils être joués, performés, voire reconstitués ?