Foetor judaicus et distillation des préjugés racisme et essence-tialisme

Résumé Fr En

Longtemps, du concept de spiritus rector au début de l’époque moderne jusqu’à la mobilisation de chiens renifleurs au début du xxe siècle, l’odeur a été conçue comme l’émanation de l’identité matérielle et corporelle d’une essence. Au fil du temps, la cause ostensible du foetor judaicus oscille entre malédictions bibliques ou accusations de sacrifices sanglants et consommation d’ail ou pauvreté. Ces accusations antisémites sans cesse remodelées varient dans leur insistance sur les sources de l’odeur ostensible, tantôt culturelles et malléables, tantôt biologiques et inaltérables. Pourtant, lorsque ces notions se distillent en une forme de savoir proverbial, invoqué dans des formules frappantes, les causes exactes de l’odeur imaginaire n’ont plus guère d’importance. L’histoire du foetor judaicus prouve que de l’essence à l’essentialisation, il n’y a qu’un pas.

Throughout the past, from the early modern concept of spiritus rector to the early twentieth century mobilisation of sniffer dogs, smell has been framed as a distillate of material and bodily identity. The antisemitic accusation, moulded and reworked over time, oscillated between biblical curses or accusations of blood sacrifice and garlic consumption or poverty. It might appear that these explanations varied in their emphasis on the malleable cultural or unalterable biological roots of the ostensible odour. Yet when distilled into a form of proverbial knowledge, invoked in a pithy phrase or saying, the precise causes of the imagined odour mattered little. The history of the foetor judaicus illustrates that it is a short distance from essence to essentialisation.