Le psychisme contraint par le corps

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2022

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Maurice Corcos, « Le psychisme contraint par le corps », L'information psychiatrique, ID : 10670/1.apkdio


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Dans l’anorexie mentale, la tête et le corps semblent n’être tombés d’accord que sur un seul point, la rupture, pure et simple, non le démembrement, ni la fragmentation, pas plus que le morcellement ou la liquéfaction. La tête de Mlle Aveut vivre aujourd’hui au-dessus des contingences, des besoins comme des limitations du corps… voire en dernière extrémité parvenir à s’en passer en tentant d’exister contre lui. Elle se corrompt alors en se coupant de sa base sensorielle, sensuelle et affective, et en tant qu’elle se promeut pur phénomène de pouvoir, dans une illusion de maîtrise narcissique. C’est qu’avec les « monstrueuses » métamorphoses pubertaires, la fragile cohérence interne antérieure de l’enfance a été mise à mal, et qu’elle ne peut accepter une recomposition de son être si elle garde au cœur la nostalgie plus ou moins idéalisée d’une unité somatopsychique perdue et de ses moments de grâce et de gloire, ou même qu’elle regrette « seulement » la latence rêveuse qui précédait l’adolescence.

In anorexia nervosa, the mind and the body seem to agree on only one point: the rupture between them, pure and simple, not dismemberment, nor fragmentation, nor liquidation. Ms A’s mind wants to live above the contingencies, needs, and limitations of the body… or even, in the last resort, to manage without it by trying to exist in conflict with it. Her mind then corrupts itself by cutting itself off from its sensory, sensual, and affective base, and by promoting itself as a pure phenomenon of power, in an illusion of narcissistic mastery. In the course of the “monstrous” metamorphoses of puberty, the fragile former internal coherence of childhood is undermined. Ms A cannot accept the recomposition of her self if she clings in her heart to the more or less idealized nostalgia for a lost psychosomatic unity and its moments of grace and glory, or even if she “only” laments the dreamy latency that preceded adolescence.

En la anorexia mental, la cabeza y el cuerpo parecen haberse puesto de acuerdo en un solo punto, la ruptura, pura y dura, no el desmembramiento, ni la fragmentación, o la licuefacción. La cabeza de la señorita A quiere ahora vivir por encima de las contingencias, las necesidades y las limitaciones del cuerpo… o incluso, en última instancia, conseguir prescindir de él intentando existir contra él. Entonces se corrompe cortándose a sí misma de su base sensorial, sensual y afectiva, y promoviéndose como un puro fenómeno de poder, en una ilusión de dominio narcisista. Es que con las “monstruosas” metamorfosis puberales se ha dañado la frágil coherencia interna anterior de la infancia, y que no puede aceptar una recomposición de su ser si guarda en su corazón la nostalgia más o menos idealizada de una unidad somatopsíquica perdida y de sus momentos de gracia y gloria, o incluso si “sólo” lamenta la latencia soñadora que precedió a la adolescencia.

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