2018
Cairn
Sonia Desmoulin-Canselier, « Usages et interprétations judiciaires des images cérébrales », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, ID : 10670/1.asylf1
Dans d'autres pays, le recours à la neuro-imagerie à des fins judiciaires se développe au point de susciter une littérature aussi abondante qu'inquiète. S'y expriment notamment des craintes concernant les incidences de ce nouvel élément probatoire sur l'appréhension de la responsabilité et sur le déroulé du procès. En France, la question est apparue plus tardivement, à l'occasion des travaux précédents la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 et de l'adoption de l'article 16-14 du code civil. Les pratiques judiciaires (antérieures et postérieures à 2011) restent toutefois mal connues. Malgré les difficultés d'accès aux décisions de justice en matière pénale, il est possible d'analyser le contentieux à partir des arrêts de la Cour de cassation et des arrêts présentant une dimension civile. À partir de ces sources, la présente étude établit un panorama des usages des images cérébrales en justice pénale, pour prouver l'altération ou l'abolition du discernement de la personne poursuivie ou pour établir l'élément matériel de l'infraction. Permettant d'appréhender une réalité inaccessible aux sens, les images cérébrales peuvent jouer un rôle crucial dans le procès pénal. Il s'agit toutefois d'un élément de preuve dont la technicité et l'effet de conviction font craindre que le principe du contradictoire soit difficile à mettre en œuvre. Dans cette perspective, il est utile de prendre conscience de la variété des paroles expertes susceptibles d'être mobilisées pour replacer l'interprétation livrée par l'expert judiciaire dans un faisceau d'éléments ou dans un débat contradictoire.