L'éternel retour du « parc social de fait »

Résumé En Fr

The collapse of three buildings in Marseille in November 2018 is one in a long series of tragedies that have marked the history of run-down housing. Since November 2018, among other categories, the notion of "de facto social housing" has once again emerged in the discourse of technicians, elected officials, associations and journalists commenting on the tragedy. This article reviews the historical emergence of this notion as a problem and category of public action. Institutional productions (reports, commissions, legislation, etc.) and media interest interact in this process of constructing the problem and "putting on the agenda" (Hassenteufel 2010) the "de facto social housing stock". An analysis of the notion's occurrences in these sources, as well as in a selection of academic writings since the 1980s, offers an insight into this process, showing definitional struggles between actors with multiple interests. Despite regular criticism of the notion of "de facto social housing stock" for its imprecision, polysemy or euphemistic description of substandard living conditions, the competing appropriations it has been subject to have ensured its longevity. These controversies shed light on the issues at stake in the precarious housing market, and allow us to explore a heuristic use of the notion of "de facto social housing" to better identify and question the processes that unfold within it.

L'effondrement de trois immeubles à Marseille en novembre 2018 s'inscrit dans la longue série de drames qui a ponctué l'histoire de l'habitat dégradé. Depuis novembre 2018, entre autres catégories, la notion de « parc social de fait » émerge à nouveau dans le discours des techniciens, élus, associations et journalistes commentant le drame. Le présent article revient sur l'émergence historique de cette notion comme problème et catégorie de l'action publique. Productions institutionnelles (rapports, commission, textes de loi, etc.) et intérêt médiatique se répondent dans ce processus de construction du problème et de « mise à l'agenda » (Hassenteufel 2010) du « parc social de fait ». Une analyse des occurrences de la notion dans ces sources, ainsi que dans une sélection d'écrits académiques depuis les années 1980, permet de comprendre ce processus de mise à l'agenda, qui fait l'objet de luttes définitionnelles entre des acteurs aux intérêts multiples. Malgré les remises en cause que la notion de « parc social de fait » suscite régulièrement pour son imprécision, sa polysémie ou sa description euphémisée de conditions de vie insalubres, les appropriations concurrentielles dont elle fait l'objet assurent sa pérennité. Ces controverses éclairent les enjeux qui touchent au marché de l'habitat précaire et nous permettent de proposer une utilisation heuristique de la notion « d'habitat social de fait » pour mieux identifier et interroger les processus qui s'y déploient.

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