L’ambivalence de l’archipel, la ciné-architecture ou l’expérience de la traversée Ambivalence of archipelago, cine-architecture or the crossing experience Fr En

Résumé Fr En

De 1964 à 2002, les films de Jean-Daniel Pollet n’ont cessé d’accompagner et de nourrir la pratique cinématographique du cinéaste Alain Moreau, le conduisant à inventer des dispositifs qui proposent, à l’instar des films Méditerranée et L’Ordre, des configurations inédites du rapport des spectateurs et des acteurs à l’image, au monde, au réel. Films dédiés à l’architecture, émissions pensées depuis la prison, il s’agit de « résister à l’image », d’ouvrir des brèches, de rendre possible un rapport « archaïque » à l’espace et au temps, à travers des blocs d’espace-temps, projet qui rencontre celui que j’avais nommé « ciné-topies ». Partant d’une réflexion sur mon propre cheminement j’en suis venue à reconstituer la genèse de l’œuvre cinématographique d’Alain Moreau. Travail de longue haleine, travail de reconstitution d’archives dont rend compte le volume de transcriptions et d’annexes qui accompagnent le texte de la thèse. Travail d’archiviste mais aussi d’interprétation fondé sur mes questions et mes lectures théoriques : la « ciné-architecture » d’Alain Moreau m’a conduite à mettre à l’épreuve l’image de l’archipel, qui me paraissait rendre compte de ma propre pratique autant que de la sienne : rapport à un réel archaïque, à partir duquel construire une multiplicité de rapports au monde, en-deçà ou au-delà de l’image. L’idée d’archipel me venant de Glissant, de Deleuze et de Melville se chargeait d’une autre complexité : l’archipel, paradigme souvent convoqué par la pensée contemporaine comme ouverture au multiple et à l’altérité, est aussi ce qui permet à Foucault de penser l’espace carcéral comme forme moderne de la discipline. Comment penser l’ambivalence de cette idée ? Comment à partir de là repenser les enjeux politiques des ciné-topies ?

From 1964 to 2002, Jean-Daniel Pollet's films continued to accompany and nourish the cinematographic practice of Alain Moreau, leading him to invent devices that propose, in the manner of the films Méditerranée and L'Ordre, unprecedented configurations of the relationship of spectators and actors to the image, to the world, to reality. Films dedicated to architecture, programs conceived from within prison, it is about "resisting the image", opening rifts, making possible an "archaic" relationship to space and time, through blocks of space-time, a project that meets the one I named "cine-topies".Beginning from a reflection on my own path, I came to reconstruct the genesis of Alain Moreau's cinematographic work. A long-term endeavor, involving archival reconstruction work as reflected by the volume of transcripts and appendices that accompany the text of the thesis. Archival work, but also an interpretation based on my questions and my theoretical readings: Alain Moreau's "cine-architecture" led me to test the image of the archipelago, which seemed to me to reflect as much my practice as his own: the relationship to an archaic reality, from which to build a multiplicity of links to the world, below or beyond the image.My idea of an archipelago, originating from Glissant, Deleuze and Melville, acquired additional complexity: the archipelago, a paradigm often summoned by contemporary thought as an opening to multiple and otherness, is also that which allows Foucault to think of prison space as a modern form of discipline. How can one consider the ambivalence of this idea? How can one then rethink the political stakes of cine-topies?

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