19 octobre 2023
info:eu-repo/semantics/openAccess , CC BY-NC-ND 4.0
Mauro Puddu, « Why archaeology today? What archaeology today? Material traces and absences of the past as cultural signs of the present », Revue Actes Sémiotiques, ID : 10.25965/as.7485
Cet article interroge l'archéologie comme une pratique qui, en exhumant et en interprétant les traces du passé, laisse ses propres traces dans le présent d'un site, d'un quartier, d'une communauté. L'archéologie peut être utilisée pour cela par différents acteurs, à travers la création d'une discontinuité à la fois dans le paysage d'une région – c'est-à-dire en choisissant d'attirer les visiteurs vers un site/musée archéologique plutôt que vers d'autres – et dans l'histoire d'une communauté – en donnant implicitement (mais aussi explicitement) le statut de sommet historique d'une civilisation à une période/événement/monument spécifique à,partir duquel tout autre âge est ajusté. Cela crée une image déséquilibrée faite de centres et de périphéries. Les quelques « centres » archéologiques clés répartis dans le monde et les innombrables « périphéries » négligées qui découlent de cette pratique ont un impact sur notre compréhension de l'humanité. Compte tenu de cette capacité inévitable de l'archéologie à nous laisser des traces matérielles et culturelles, cet article se demande si et comment l'archéologie peut être utilisée pour avoir un impact positif sur les sociétés actuelles en répondant aux demandes sociales du temps présent. Une telle pratique ne fait-elle que générer une accumulation indiscriminée d'objets qui ne seront jamais ni étudiés par des spécialistes ni exposés au public tendant à faire s'effondrer les réserves des musées ? Ou aide-t-elle les communautés locales et mondiales à raisonner sur elles-mêmes en portant un point de vue historiquement plus profond sur l'humanité ? Est-ce l'archéologie utilisée pour justifier des actions menées dans le présent, pour rechercher des signes d'ascendance prestigieuse ou comme un moyen d'accepter et de dignifier l'altérité ? Les réponses à telles questions varient sensiblement selon la position sémiotique que les acteurs de la discipline adoptent sur l'archéologie comme pratique : si les archéologues la voient, en synthèse, comme une discipline des choses ou comme une discipline des traces. En réfléchissant à quelques exemples d’études telles que le projet « Walking Through Outdoors Ruins » de Koudelka pour Magnum, l'archéologie de l'âge du bronze et de l’Âge romain, et le paradigme dominant de la communication de l'archéologie au public, cet article expose les rôles sociaux que l'interprétation du passé a joués jusqu'à présent, tentant de prédire ses trajectoires futures jusqu'à certaines de ses conséquences extrêmes – comme en Funes el-memorioso de Borges – possibles, en essayant de comprendre comment les éviter.