2020
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/altIdentifier/doi/10.1515/9783110546316-006
http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/ , info:eu-repo/semantics/OpenAccess
Julien Demade, « De la délégitimation contemporaine de l’histoire (médiévale) en particulier, et des disciplines fondamentales en général », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10.1515/9783110546316-006
La délégitimation actuelle de l'histoire, et particulièrement de l'histoire médiévale, est liée à l'évanescence de l'État-nation, dans la mesure où celui-ci assurait sa justification par la geste de ses origines, aussi lointaines que possible ; tandis que c'est désormais la discipline économique, et ses logiques ahistoriques, qui forme l'idéologie d'un système où les entreprises multinationales, et les institutions transnationales qui vont avec, ont pris le dessus. Mais plus largement la délégitimation de l'histoire (médiévale) s'inscrit dans le cadre de la perte de légitimité des disciplines fondamentales en général, due au fait que les seules valeurs désormais reconnues sont les valeurs monétaires, parce que le capitalisme avancé est parvenu à faire coïncider l'idéologie (c'est-à-dire les valeurs) qui en permet la reproduction avec les mécanismes mêmes qui en forment le cœur – ce dont le fait que la discipline économique ait pris le pas sur les autres sciences sociales (dont l'histoire) n'est donc qu'une illustration sectorielle. Corollairement, le cursus des élites s'est déplacé des disciplines fondamentales vers les disciplines appliquées ; à cet accroissement qualitatif du recrutement de ces dernières s'est ajouté le fait qu'elles ont été les premières bénéficiaires de la massification de l'enseignement supérieur, et cette double augmentation qualitative et quantitative a renversé en leur faveur le rapport des forces au sein du champ académique. Ainsi la délégitimation sociale s'est-elle traduite en délégitimation académique.