2017
Cairn
Caelesta Braun et al., « Les forces du changement stratégique et les causalités communes. Le cas des primes versées aux banquiers : perspectives », Revue Internationale des Sciences Administratives, ID : 10670/1.bi8imn
Parmi les rares conclusions rigoureuses de la littérature consacrée aux politiques publiques, on trouve le fait que la dynamique politique est à la fois une fonction de stabilité et de volatilité. Et bien que la plupart des théories relatives à la politique publique postulent que la survenue de moments critiques politiques constitue une condition nécessaire à un changement d’envergure, les études qui cherchent à démêler l’écheveau des mécanismes sous-jacents de ces moments critiques demeurent relativement rares. Le présent article développe l’hypothèse selon laquelle ces moments critiques, généralement considérés comme des vecteurs de changements d’envergure, impliquent pour l’essentiel une causalité commune. Nous montrons que les forces du changement ont une nature commune et qui les renforce mutuellement à l’aide d’une étude de cas axée sur la réglementation relative aux primes. Le présent article, qui se base sur une analyse documentaire et une analyse de programme politique, démontre que la plupart des changements de la règlementation relative aux primes étaient marginaux. Nous soutenons que la nature intrinsèquement attrayante de la récompense des performances, combinée à une totale absence d’alternatives soutenues par une coalition forte et visant à modérer l’appétit du risque sur les marchés financiers, semble jouer un rôle dans la résilience des pratiques en matière de primes. En théorie, l’étude de cas contribue au développement de la théorie de la causalité commune qui entraîne des changements politiques majeurs. Sur le mode empirique, elle expose un mécanisme clé utilisé par le secteur financier pour résister aux réformes : proposer une alternative que personne ne peut refuser.Remarques à l’intention des praticiensLa littérature relative à la politique exprime un vaste consensus quant au fait que les changements politiques résultent généralement de forces multiples. Nous identifions cette causalité commune des changements politiques et suggérons que parmi les forces du changement, une alternative politique forte capable d’unir une vaste coalition de parties prenantes constitue une condition nécessaire à un changement politique. Il est donc peu probable que les réformes financières, et plus spécifiquement la pratique des primes, soient moins le résultat d’une réglementation stricte que d’alternatives réelles pour récompenser l’excellence professionnelle et réduire l’appétit du risque.