2014
Cairn
Rajaa Stitou, « L'intraduisible et la parole d'une langue à l'autre », Cliniques méditerranéennes, ID : 10670/1.bx1mr4
L’intraduisible est au cœur de toute langue. C’est ce qui confronte à l’équivoque d’où peut surgir la voie de l’inventivité et de l’étincelle poétique. Mais il peut aussi exposer au ravage lorsqu’un sujet ou une société transforme l’impossible à dire en impuissance ou en manque à combler. Qu’en est-il du devenir de la parole lors du passage d’une langue à une autre ou lorsque le sujet se sent comme banni du monde parce qu’il parle une langue autre non reconnue comme partageable ? Ceux qui souffrent dans leur langue dite maternelle peuvent-ils nommer leurs blessures dans une autre langue ?L’expérience clinique montre que le recours aux langues étrangères peut constituer un refuge, une défense ou une tentative de délivrance. Mais quel que soit le cas de figure, ce qui est concerné, c’est le rapport de chaque sujet à sa « lalangue ». La « lalangue » qui contient de l’inconnu dans son « archéologie la plus souterraine » est à l’œuvre dans la langue étrangère. Elle véhicule ce qui ne peut s’effacer ni se traduire dans aucune langue apprise. Et dans aucune langue on ne peut se défaire de l’inconscient.