The Social State at the Service of the Wage Model? On the Autonomy of Inspectorates in the Rise of Digital Platforms L’État social au service du salariat ? De l’autonomie des corps d’inspection face à l’essor des plateformes numériques En Fr

Résumé En Fr

In the last decade, the inspectorate bodies of the Social State - labor and social security inspectors - have been involved in actions aimed at reclassifying workers on digital platforms from self-employed to employees. This article seeks to understand how these agents have been able to initiate legal disputes, despite continued government support for these companies, in a period of labor law deregulation, and at a time when inspections and sanctions are increasingly rare. An ethnographic study reveals that these agents use different forms of autonomy: on the one hand, the discretionary power of street-level bureaucrats, and on the other hand, a form of institutional support linked to the fundamental missions of these institutions as guardians of social law. Bureaucratic autonomy is also achieved by participating in anti-fraud policies, which provide additional resources and legitimacy and avoid direct opposition to the supervisory authorities. Lastly, recourse to the courts, while introducing uncertainty as to the outcome of controls, enables these inspectorates to escape political and bureaucratic impediments to their actions.

Des corps d’inspection de l’État social – inspecteur∙rices du travail et des caisses de sécurité sociale – sont partie prenante depuis une dizaine d’années d’actions visant à requalifier les travailleurs des plateformes numériques de travail de l’indépendance vers le salariat. Cet article vise à comprendre comment ces agent∙es ont pu initier des actions contentieuses, en dépit du soutien gouvernemental à ces entreprises, dans un contexte de libéralisation du droit du travail, et alors que les contrôles et sanctions sont de plus en plus rares. Une enquête ethnographique permet de saisir que ces agentes usent de diverses formes d’autonomie : d’une part, d’un pouvoir discrétionnaire des agent∙es de terrain, et d’autre part d’un certain soutien institutionnel lié aux missions fondamentales de ces institutions garantes du droit social. L’autonomie bureaucratique se conquiert aussi par un enrôlement dans les politiques de lutte contre la fraude, offrant des moyens et une légitimité supplémentaires, évitant par là une opposition frontale aux tutelles. Enfin, le recours aux tribunaux, bien qu’introduisant une incertitude quant à l’issue des contrôles, permet à ces corps d’inspection d’échapper à des entraves politiques et bureaucratiques à leurs actions.