“Les Diégèses de Callimaque (P.Mil.Vogl. 1.18). Du résumé au commentaire”

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2022

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Charles Delattre, « “Les Diégèses de Callimaque (P.Mil.Vogl. 1.18). Du résumé au commentaire” », HAL-SHS : histoire de l'art, ID : 10670/1.cc1bhf


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L’objectif de cette communication est de présenter un texte connu aujourd’hui sous le nom de Diégèses à Callimaque et de réfléchir à son insertion dans la tradition du commentaire, de façon à étendre la définition de ce terme en fonction des pratiques des anciens, non des catégories contemporaines.Dans la lignée de R. Pfeiffer, History of classical scholarship, le commentaire antique est souvent défini à partir des pratiques exégétiques des Alexandrins comme un texte secondaire en prose, portant sur un texte premier qui, par le fait même qu’il subit un commentaire, change de statut pour entrer dans un canon en cours de formation.Depuis vingt ans, de nombreuses études ont montré qu’on ne pouvait se contenter de cette définition : • le commentaire, quoique toujours lié à son texte premier, peut prendre de l’autonomie et devenir un texte à part entière, voire devenir lui-même l’objet de commentaires. • l’auteur du commentaire est proprement un auteur, avec ses choix épistémologiques et discursifs. • le commentaire n’est pas cantonné à la prose : commentaire poétique et poétique du commentaire s’entrelacent à l’époque hellénistique et romaine (et peut-être dès l’apparition de la prose écrite).Le texte des Diégèses est lui-même rarement rattaché à la tradition du commentaire, si l’on excepte les 4 pages que lui conscacre A. Cameron (2004) et l’étude papyrologique de M. Van Rossum Steenbeck (1999) : on se contente le plus souvent d’en faire une suite de résumés de l’œuvre de Callimaque.I. Présentation du papyrus PMilVogl 1.18Le papyrus, partiellement incomplet, comporte une série de notices, identifiées par un lemme et clairement séparées. Les œuvres de Callimaque que l’auteur des Diégèses prend en compte sont les Aitia, l’Hécalé et les Hymnes I et II du poète.Le titre Diegeseis est celui porté sur le papyrus lui-même, à un détail près : l’auteur a indiqué qu’il composait des Diegeseis sur les 4 livres des Aitia, sans mentionner l’Hécalé ni les Hymnes. Il faudra tenter d’expliquer ce décalage.II. Un premier exemple : l’Hymne à ZeusAlors que la plus grande part de l’œuvre de Callimaque nous est parvenue de façon fragmentaire, nous possédons le texte de ses Hymnes et pouvons donc comparer dans le détail le texte source et son prétendu résumé.On peut conclure de cette comparaison • que la complexité du texte de Callimaque (rapports politiques avec les Ptolémées, intertextualité avec la Théogonie d’Hésiode) n’est pas prise en compte dans la Diégèse. • que seule une portion de l’Hymne est résumée dans la Diégèse. • que le texte de la Diégèse relève cependant fidèlement l’essentiel dans le passage considéré, y compris dans des détails peu signifiants au premier abord.La Diégèse n’est donc pas un résumé, mais la reformulation d’un passage sélectionné, peut-être parce que ce passage était jugé représentatif de l’ensemble de l’Hymne et des buts poétiques de Callimaque. En effet, les éléments jugés pertinents sont ceux qui font écho à d’autres productions hymniques, de l’époque archaïque (Hymne homérique à Dionysos, I) ou hellénistique (Aratos, Phainomena, I, 1-18 + I, 31-35).III. Un deuxième exemple : le cas de l’Iambe VIIL’Iambe VII est très incomplet. Une comparaison permet de noter les mêmes décalages que pour l’Hymne à Zeus : • sélection d’un passage seulement de l’Iambe. • reformulation qui délaisse les jeux intertextuels ou les particularités poétiques de Callimaque. • prise en compte d’un élément central de l’Hymne : la fonction étiologique de la dédicace poétique composée par Callimaque.Ce dernier point permet de réorienter la fonction à attribuer aux Diégèses : elles reformulent en effet systématiquement l’œuvre de Callimaque en mettant en valeur sa structure étiologique. On est donc tenté de faire des Diégèses un relevé anthologique composé à partir de l’œuvre de Callimaque, centré sur le motif des étiologies.IV. Pourquoi Diégèses ?Le choix du titre Diégèses par l’auteur du papyrus confirme à sa façon cette nouvelle définition. Diégèse est un terme double, qui signifie soit « narration » en général, soit « narration simple » en opposition avec « narration mimétique » (Platon). On retrouve cette ambiguïté dans les traités rhétoriques d’époque romaine, où diègèsis désigne tantôt le « discours », tantôt cet exercice de prose narrative qu’est le diègèma (Théon).Comme « narration » englobant différentes catégories, diègèsis peut donc bien s’appliquer au texte de notre papyrus. Mais dans ces catégories, deux termes pourraient s’appliquer à notre texte : • hupothesis, « exposé d’un cas », qui s’applique à la présentation des œuvres dramatiques, et qui comprend aussi bien le résumé partiel de l’intrigue que des éléments extérieurs, y compris non présents dans les pièces résumées. • historia, « anecdote », « récit explicatif » d’un passage poétique, qui a la faculté d’être insérée à titre d’exemplum dans des discours mais qui peut aussi être l’item d’un catalogue ou d’une anthologie. Ce dernier emploi permet de définir l’unité des trois textes recueillis dans le Palatinus Graecus 398 (Parthénios, Erôtika pathèmata ; Antoninus Liberalis, Métamorphoses ; Ps. Plutarque, De fluviis) et est central pour définir le Mythographus Homericus, entre autres.Comme les Narrationes associées à Ovide, les Diegeseis sont plus qu’un résumé : elles sont l’anthologie d’un type particulier de commentaire.

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