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Dionigi Albera et al., « Un pèlerinage paradoxal. La synagogue de la Ghriba à Djerba », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.cea310...
En Afrique du Nord, la coexistence de longue durée entre juifs et musulmans a généré de nombreux croisements interconfessionnels. Il n'était pas rare que les fidèles d'une religion se rendent dans le sanctuaire de l'autre, afin d'obtenir une "baraka" (grâce divine). Ce phénomène a pratiquement disparu dans tout le Maghreb, mais il persiste sur l'île de Djerba (sud de la Tunisie), où vivent encore plus d'un millier d'israélites. Chaque année, à l'occasion de la fête juive de Lag Ba'Omer, un pèlerinage rassemble des milliers de fidèles dans la synagogue de la Ghriba. Beaucoup viennent de l'étranger, notamment de France et d'Israël, où de nombreux Juifs tunisiens ont émigré après le milieu du XXe siècle. Certains musulmans participent également à différents moments du pèlerinage. Basé sur des recherches historiques et sur un travail ethnographique réalisé en 2014 et 2022, cet article élucide une série de paradoxes qui font la singularité de ce lieu saint. Ici, les interactions entre juifs et musulmans au sanctuaire sont caractérisées par une intense convivialité. Pourtant, au cours des dernières décennies, ce site a été touché par des éruptions tangibles de violence sanglante de la part de terroristes islamistes. La structure du pèlerinage semble reposer sur un équilibre délicat entre les forces locales et extérieures. Plus généralement, le pèlerinage de la Ghriba est traversé par des dynamiques politiques majeures et est affecté de manière récurrente par les remous du conflit israélo-palestinien.