Entre éphémère et Évhémère : fulgurance et durée de Frénaud

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11 mai 2012

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Arnaud Despax, « Entre éphémère et Évhémère : fulgurance et durée de Frénaud », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.cp7wl5


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Résumé Fr

L’éphémère donne valeur à l’écriture poétique : les choses concrètes ne perdurant pas, le poème peut prétendre les inscrire – et s’inscrire lui-même – dans l’éternel (e. g. « Ce que Malherbe écrit dure éternellement »). Tributaire de ce désir de pérennité, mais tout aussi conscient de la précarité de la vie et de lui-même, André Frénaud (1907-1993) offre pourtant une conception moderne de l’éphémère étroitement liée à l’exercice de la poésie, dans un feuilleté spécifique de contradictions qui semble en renouveler l’idée. D’abord, pour décrire cette expérience de la Totalité qu’est la poésie, Frénaud parle d’instant, d’un événement essentiellement bref, épiphanie dont le poème garde la trace pour finalement s’y substituer, dans son apparaître même. Les rapports du poète avec les arts spatiaux, peinture et dessins (œuvres de Raoul Ubac, Fernand Léger, Joan Miro ou André Masson, accompagnant ses textes) induisent une influence de la lecture tabulaire sur l’écriture et la présentation du poème, et surtout enrichissent une esthétique de la fulgurance du trait, appelée « passage de la visitation » (Il n’y a pas de paradis), actualisant la captation imaginaire des enjeux poétiques sur l’étendue labile de la page comme de la toile. Ce jeu de tensions – entre le plein et le creux, le temps et l’espace –, socle de la poétique frénaldienne, est explicitement mis en évidence à la fin de l’œuvre. Dans le recueil Hæres en effet, dont le titre (en fonction du latin) fait signe vers la fixité, l’éphémère est convoqué dans sa complémentarité oxymorique avec l’éternel, ou comme élément dysphorique de l’existence humaine : seul repère, il semble s’opposer à ce qui le dit. Or dans les deux cas, la création poétique apparaît capable de subsumer et de dépasser les tensions comme le pressentiment de la ruine. En revanche, le poème « Ephémère, Evhémère » de Nul ne s’égare, dernier livre publié par Frénaud, articule présentation de l’éphémère et relations entre les dieux et les hommes : la paronomase sert une instabilité ludique, où l’athéisme de Frénaud se trouve infléchi au profit des dieux éternels, mais surtout la préoccupation poétique s’oriente vers une dimension anthropologique. Le poème nous projette en pleine histoire des religions, pour questionner le sens et la valeur de l’évhémérisme, affirmé puis nié. On peut donc se demander si cette convocation de l’éphémère dans la poésie moderne ne permet pas de faire de lui non seulement la seule permanence possible, associant le désir d’éternité poétique et l’acceptation éthique de sa faiblesse, mais encore le lieu de cristallisation et de projection d’un regard sur le rôle de la poésie vis-à-vis d’autres domaines du savoir et de l’art, où la soif de durer ne le disputerait pas à l’orgueil créateur.

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