2023
Veronica Estay Stange et al., « Traduire le rythme des émotions », Archive ouverte de Sciences Po (SPIRE), ID : 10670/1.cpjofd
À travers l'analyse des techniques expressives de certains écrivains et artistes, cet article met en évidence le rôle du rythme comme vecteur fondamental de cette traduction. Selon notre hypothèse, c'est avant tout le substrat rythmique des émotions qui détermine leur entrée dans le langage, de sorte qu'"exprimer une émotion" revient à traduire son propre rythme.L'émotion ainsi exprimée (traduite) entre alors dans un circuit communicationnel en étant interprétée par le récepteur au cours duquel elle subit d'inévitables transformations (car l'expérience émotionnelle n'est jamais exactement la même d'un individu à l'autre). À ce stade, un second processus de traduction, entre sujets, est donc mis en œuvre sur la base d'un rythme partagé. Cet échange intersubjectif peut donner lieu à la production d'un nouveau discours, dans une autre langue. Là encore, des mécanismes de traduction des rythmes affectifs sont convoqués, mais cette fois en traversant les arts et les substances d'expression.En somme, de l'intériorité du sujet à l'œuvre d'art, de celle-ci à un second sujet et de celui-ci à un nouveau discours dans une autre langue ou une langue différente, la traduction du rythme serait la clé de l'expression et du partage des émotions. Ainsi, nous considérerons le rythme comme véhicule d'affects, d'une part, et comme facteur de transversalité sémiotique, d'autre part.