Devenir « lion » ou « biche » : construction du genre et rapports au territoire dans les initiations kabyè (Togo)

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2021

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Les initiations masculine et féminine kabyè (Togo) présentent d’importantes similitudes structurelles. Elles font appel aux mêmes entités initiatiques et se déroulent en partie dans les mêmes lieux, en prenant des formes comparables (sacrifices, processions, démonstrations de puissance). La construction des jeunes gens en hommes et femmes adultes repose pareillement sur des processus d’inscription dans un territoire sur lequel s’originent clans et lignages, de manière à affermir l’appartenance lignagère et communautaire, tout en officialisant une aptitude à la procréation. Le caractère peu ésotérique de ces initiations est lié à l’importance donnée aux démonstrations et dévoilements de qualités physiques ou « mystiques » individuelles conçues comme caractéristiques d’idéaux masculins et féminins locaux. Nous tenterons de montrer qu’au-delà de ces convergences, les différences dans la mise en œuvre des rites initiatiques masculins et féminins tiennent aux spécificités des rapports sexués à l’espace de brousse. Alors que toute fille naît porteuse d’une matrice sauvage que le processus initiatique tend à domestiquer, les garçons vont, à l’inverse, s’engager dans un processus d’ensauvagement construisant un habitus de guerrier-chasseur les rendant aptes à intervenir efficacement dans les rites annuels et quinquennaux de renouveau d’un territoire propice à la vie humaine. Ces mouvements complémentaires s’actualisent notamment par des interactions entre hommes et femmes prenant pour modèle les rapports entre animaux prédateurs (« lions ») et proies (« biches ») tels qu’ils sont conçus localement. Ces rapports de prédation sont sous-jacents non seulement à la construction des statuts d’homme et de femme, mais aussi à l’appréhension du rapport à l’autre, la relation à l’autre sexe et à l’extranéité constituant deux facettes importantes de la construction initiatique.

The Kabye (Togo) male and female initiations have important structural similarities. They call upon the same initiatory entities, take place in part in the same places, and take comparable forms (sacrifices, processions, power demonstrations). Young men’s and women’s initiation into adulthood is similarly based on processes of adhesion to a territory in which clans and lineages originate, so as to strengthen lineage and community membership while officializing an aptitude for procreation. The essentially non-esoteric nature of these initiations is linked to the importance given to the demonstration and revealing of physical or « mystical » individual qualities conceived of as characteristics of local masculine and feminine ideals. The article shows that, beyond these convergences, the differences in the implementation of male and female initiation rites are due to the particularities of gendered relations to the bush space. While every girl is born with a wild matrix that the initiation process tends to domesticate, boys, on the other hand, engage in a process of becoming wild that builds a warrior-hunter habitus, making them capable of intervening effectively in the annual and quinquennial rites of renewal of a territory that supports human life. These complementary movements are actualized in particular by interactions between men and women taking as a model the relationships between predatory animals (« lions ») and their prey (« deer ») as they are conceived of locally. These predatory relationships underlie not only the construction of the status of man and woman, but also the apprehension of the relationship to the other, as the relationship to the other sex and to foreignness constitute two important facets of the initiatory construction.

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