Airial landais et « géographie du flou » : l’émotion comme relation au et connaissance du vivant

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6 novembre 2023

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Emilie Ropert Dupont et al., « Airial landais et « géographie du flou » : l’émotion comme relation au et connaissance du vivant », HAL-SHS : géographie, ID : 10670/1.ctpn36


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Lieu d’habitation et d’exploitation agricole propre au système agropastoral structurant la sociétélandaise du Moyen-Âge au milieu du XIXe siècle, l’airial est régulièrement dépeint en tantqu’archétype du « bonheur paysan », fruit d’une construction culturelle à rebours d’une approchegéo-historique permettant de resituer cet espace dans un contexte social conflictuel et inégalitaire(Dupuy 1996). Édifié sur la lande, au sens pédologique du terme, l’airial s’est trouvé immergé dansune forêt de production en quelques décennies, suite à l’aliénation des communs organisée parNapoléon III en vue de l’afforestation massive du plateau des Landes de Gascogne, opérée de1857 au début du XXe siècle. Nous le considérons comme une interface habitat-forêt dans le cadrede notre étude portant sur une trentaine de bâtis appartenant au Groupement forestier de la Compagnie des Landes. Notre méthodologie associe entretiens semi-directifs, cartographie,littérature grise et archives départementales.Une fluidité des espaces, définie comme « géographie du flou », caractérise les airiaux. Leschemins de servitude qui les traversent se rapportent au droit réel médiéval reposant sur l’usageeffectif d’un bien (Vanuxem 2021). Les limites des airiaux, fluctuantes, répondent à des logiquesissues de l’expérience du lieu, et diffèrent des plans administratifs. Enfin, l’airial constitue unerelation au vivant et au non-vivant (Latour 1991, Descola 2005), ainsi qu’un lieu de veilleenvironnementale. Relative à une échelle micro-géographique, la « géographie du flou » (Monnet2001) propose une articulation pluridisciplinaire du concept de « flou », qui voit dansl’indétermination un vecteur d’action. Le flou mobilise les émotions, les affects, les sens ; ilprédétermine un rapport sensible aux espaces habités, au territoire et à ses composantesculturelle, linguistique, identitaire.Les territoires sur lesquels ces manières d’habiter s’inscrivent s’apparentent à des palimpsestes àdéchiffrer. Lande, forêt résinière, forêt incendiée en réaction aux grands travaux d’aménagementà l’époque industrielle, forêt papetière, forêt de production, la forêt des Landes de Gascognesuperpose aujourd’hui des pratiques et des risques renvoyant à des émotions disparates. Cesaffects s’expriment vis-à-vis du vivant et l’incluent, de sorte qu’il apparaît comme consubstantiel àla manière d’habiter l’airial. Suivant une conception de la nature comme entité par rapport àl’Homme, la prise en compte du vivant influe sur la révision des réglementations, fixant parexemple l’objectif de « Zéro Artificialisation Nette » d’ici à 2050. Cette intégration du vivant serépercute en outre sur les gouvernances en lien avec la géoéthique (Brennetot 2020) et lebiorégionalisme (Rollot, Schaffner 2021). La « géographie du flou » pourrait alors être décrite nonseulement comme une manière d’habiter l’espace, mais comme une « manière d’être vivant »(Morizot 2020) construisant une « transition juste ». Cette « géographie du flou » est sous lapression d’une « géographie des flux » fonctionnaliste, dans laquelle la gouvernance par lesnombres (Supiot 2020) prévaut sur la qualité, les communs (Ostrom 2010), le sensible. L’émotionpeut alors être considérée comme vectrice d’une empathie (Pacherie 2004) envers le vivant quiparticipe du processus de connaissance (Damasio 2006) et conditionne la conduite des politiquesde transition.

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