Trois piliers de l’esprit scientifique : contributions psychanalytiques à une méta-théorie de la connaissance

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Dans le rapport conflictuel entre science et psychanalyse, on peut néanmoins repérer des contributions constructives qui, à partir de concepts psychanalytiques, décrivent les opérations de pensée propres à l’esprit scientifique. Ainsi, Gaston Bachelard fila la métaphore psychanalytique pour pointer les obstacles épistémologiques internes inhérents à toute activité de recherche qui, à la manière des résistances d’un patient, inhiberaient les progrès scientifiques. Il suggérait comme remède une « psychanalyse de la connaissance objective », qui se prolongera en « méta-théorie » de la pratique clinique et, plus généralement, de la connaissance. Celle-ci se fonde sur trois concepts que cet article se propose d’expliciter : l’opération auto-méta, la réflexivité et la capacité au négatif. Cette revue de littérature intègre le point de vue de différents auteurs issus ou non du champ psychanalytique et se conclut sur l’ambitieuse théorie de la re-connaissance de Jean Guillaumin. Ce cadre conceptuel général est capable de rendre compte des modalités du rapport au savoir, tant dans la démarche de recherche scientifique que dans la dynamique de la pratique clinique. Cette théorie, fondée sur l’interdépendance entre observateur et observé, subvertit la vision conventionnelle d’une science sans sujet, pour lui substituer une dynamique basée sur la subjectivation auto-critique du sujet de l’objectivation.

In the conflictual relationship between science and psychoanalysis, one can nevertheless find constructive contributions which, on the basis of psychoanalytic concepts, describe the thought processes associated with the scientific mind. Thus, Gaston Bachelard spun the psychoanalytic metaphor to point out the internal epistemological obstacles inherent in any scientific activity which, like the resistances of a patient, would inhibit scientific progress. He suggested as a remedy a “psychoanalysis of objective knowledge” which will extend into a meta-theory of clinical practice and, more generally, of knowledge. This one is based on three concepts that this article proposes to explain: the self-meta operation, the reflexivity and the negative capability. This review of literature integrates the point of view of different authors, whether or not they come from the psychoanalytic field, and concludes with Jean Guillaumin’s ambitious theory of re-knowledge as a general conceptual framework able to account for the modalities of the relation to knowledge, both in the scientific research process and in the dynamics of clinical practice. This theory, founded on the interdependence between observers and observed, subverts the conventional view of a subject-less science and replaces it with a dynamics based on the self-critical subjectivation of the subject of objectification.