L’écocide : pourquoi ? Éléments d’analyse dans une réflexion jungienne

Résumé Fr En

En tant qu’analystes, comment pouvons-nous penser les facteurs inconscients collectifs participant à l’avènement de la crise systémique actuelle ? L’axe central de cette problématique me paraît être constitué par le rapport faussé de l’être humain à sa propre nature de créature, l’amenant à projeter collectivement ses problématiques infantiles non résolues sur un mode archétypique, pour tenter de restaurer un soi-corps ayant été artificialisé durant sa construction. Le principe évolutif, soutenu par le Soi, ne cherche-t-il pas à nous faire enfin prendre conscience des limites et des abus des lectures classiques des mythes fondateurs de nos sociétés, afin que nous nous confrontions à notre intériorité psychique sous ses aspects mortifères encore inexplorés au lieu de nous en décharger à ciel ouvert ? La virulence d’un complexe contre-œdipien inconsciemment à l’œuvre et toujours agissant culturellement, au niveau familial œdipien comme religieux, y est inscrite explicitement. Ce complexe demande à être élaboré car il sous-tend le comportement collectif suicidaire inconscient et archaïque qui nous agit en polluant notre Terre-Mère. Le risque pris de l’écocide peut se lire comme une crise occidentale collective d’adolescence dont la génération montante s’empare avec l’espoir d’en transformer la donne archétypique.

As analysts, how can we think about the collective unconscious factors involved in the advent of the current systemic crisis? The central axis of this problematic seems to be constituted by the distorted relationship of the human being to his own nature as a creature, leading him to project his unsolved infantile problems on an archetypal mode, in order to restore a body-Self which has been artificialised during its building. Doesn’t the evolutionary principle, supported by the Self, seek to make us finally become aware of the limits and abuses of classical readings of the founding myths of our societies, so that we can confront our psychic interiority in its as yet unexplored deadly aspects, instead of dumping them into the open air? The virulence of a counter-oedipal complex, unconsciously at work and still acting culturally, on the oedipal family level as on the religious one, is explicitly inscribed here. This complex needs to be elaborated because it underlies the unconscious and archaic collective suicidal behaviour, which we enact by polluting our Mother Earth. The taken risk of ecocide can be read as a collective Western crisis of adolescence, which the rising generation seizes with the hope of transforming the archetypal situation.