De l’autorité médicale aux autorités urbaines : la mise en pratique des traités de peste à Chartres au XVIe siècle

Résumé Fr

La peste est une maladie récurrente dans les villes de la période moderne, et Chartres n’échappe pas à la règle. En effet, cette ville moyenne du Nord-Ouest du royaume de France connaît un nombre important d’épisodes de peste au XVIe siècle, notamment dus à trois facteurs : sa proximité avec Paris, son axe navigable ainsi que son pèlerinage, encore très important à l’époque moderne. Les autorités urbaines, au premier rang desquelles on trouve le Conseil de ville, développent tout au long du siècle un répertoire d’actions pour lutter contre la peste, qui vont de la fuite à l’enfermement, du nettoyage des rues aux feux urbains, de l’interdiction de commercer à la création d’un sanitas, etc. On peut d’ailleurs diviser le XVIe siècle en deux phases, avec une première phase d’expérimentation, qui s’étire jusqu’en 1560-1580, et une deuxième phase de normalisation des mesures à partir de 1560-1580 (une telle amplitude est due au fait que certaines mesures atteignent leur forme finale plus tôt que d’autres). Les sources que ces autorités nous ont laissé témoignent des débats médicaux qui ont cours au XVIe siècle, notamment quant aux modes de contamination, mais aussi quant aux réponses à adopter face aux pestes, dans la mesure où les médecins et chirurgiens sont fréquemment appelés au Conseil de ville pour donner leur avis sur les ordonnances à prendre pour lutter contre la peste, pour discuter de lieux d’enfermement pour les malades, etc.Nous proposons ainsi d’étudier comment la lutte effective d’une ville contre la peste révèle l’évolution des discours et des théories médicales sur la peste au XVIe siècle. Il s’agira ainsi d’analyser quelles sont les autorités qui semblent convoquées à Chartres durant la période, mais aussi les limites de cette convocation. En effet, les pouvoirs municipaux (tout comme les médecins qu’ils consultent) sont imprégnés des théories médicales, mais ces dernières se heurtent aussi parfois à la réalité locale qui nécessite d’adapter les mesures théoriques. Ce jeu entre la théorie et la pratique nous semble également un élément essentiel dans le rapport à l’autorité. Par ailleurs, il nous semble intéressant de nous demander dans quelle mesure les pouvoirs urbains ne deviennent pas, à une échelle locale, des autorités à part entière dans la gestion des pestes, tant la réutilisation de mesures tout au long du XVIe siècle est commune, ce qui légitimerait le discours administratif et politique et en ferait un discours sur la peste à part entière.