2007
Cairn
Dominique Lestel, « Histoire des animaux singuliers », Bulletin d’histoire et d’épistémologie des sciences de la vie, ID : 10670/1.dann1h
Les animaux singuliers ont des capacités importantes d’apprentissage et de « développement personnel » qui permettent de les distinguer de leurs congénères. Par leurs compétences (ex. : la capacité de parler) ou leurs comportements (ex. : faire preuve d’une culture), ils incarnent une plasticité aux marges qui permet l’innovation de l’espèce. Ainsi l’animal singulier déstabilise la notion d’espèce en inversant la relation entre espèce et individu tout autant qu’elle fait vaciller le modèle épistémologique de l’éthologie depuis la biologie vers les sciences sociales. La question de l’animal singulier se décline selon trois axes. Épistémologique : que peut être une éthologie qui accorde une place centrale à l’animal singulier et donc aux anecdotes et à une forme d’anthropomorphisme ? Métaphysique : que signifie vivre dans un monde dans lequel les animaux sont des fenêtres ouvertes sur des subjectivités différentes plutôt que des robots enfermés dans des déterminismes ancestraux ? Méthodologique : comment faire de l’animal singulier un objet fondamental en éthologie ? La question de l’animal singulier permet d’appréhender ce que pourrait être une épistémologie « militante » par opposition à une épistémologie historique. Elle permet de repenser la manière dont l’éthologie construit son objectivité, d’un côté en refusant toute pertinence aux animaux aux marges de l’espèce, de l’autre en disqualifiant la légitimité des savoirs de praticiens de l’animal (éleveurs, dresseurs, dompteurs, etc.) et de spécialistes non occidentaux de l’animal.