3 avril 2025
Catherine Muller, « Puissance de l'imaginaire dans le roman graphique "Je ne partirai pas. Mon histoire est celle de la Palestine" de Mohammad Sabaaneh », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.dbfb46...
Ancré dans « la bande dessinée du réel » (Lesage, 2022), le roman graphique "Je ne partirai pas. Mon histoire est celle de la Palestine" de l’illustrateur et caricaturiste palestinien Mohammad Sabaaneh a été publié en 2021 aux Etats-Unis et traduit en 2023 en français. A partir du récit de ses cinq mois passés dans une prison israélienne en 2013, l’auteur livre un témoignage sur le quotidien des habitants dans les territoires palestiniens occupés, autant d’expériences traumatisantes. Je propose d’étudier cet ouvrage constitué de linogravures sous l’angle de l’imaginaire idéel, en tant que système organisé de conceptions mentales, et de l’imaginaire fictionnel, comme univers esthético-ludique (Muller, 2021). En quoi ce roman graphique manifeste-t-il une dynamique de résilience (Schauder, 2012) en créant un imaginaire idéel pour les lecteurs à travers l’imaginaire fictionnel ? Je porterai une attention particulière à la dimension verbo-iconique à travers l’analyse des choix graphiques, qui évoquent l’imagerie surréaliste.Mohammad Sabaaneh donne à voir la réalité de la situation vécue par les Palestiniens et leur résistance, ce qui nourrit l’imaginaire idéel des récepteurs. L’auteur se met en scène en tant que sujet mais il a également recours à des procédés d’immersion qui se manifestent au niveau énonciatif par l’usage de la deuxième personne du singulier lors de la communication avec un oiseau. Le lecteur est ainsi directement impliqué, invité à travers la pratique du « comme si » à vivre fictivement l’expérience du narrateur. Les oiseaux, doubles du lecteur, parlent entre eux de la situation, ce qui permet d’adopter un regard extérieur. L’ensemble du roman graphique témoigne de l’importance de l’imaginaire fictionnel pour les habitants, sous forme de souvenirs, de rêves, mais également d’humour. A travers son art empreint de poésie, l’auteur rend compte d’un processus de résilience et manifeste la force de l’imaginaire face à un réel catastrophique.