14 décembre 2020
Tatiana Monassa, « L’effet-caméra : essai sur le cadre mobile comme perception technique », HAL-SHS : histoire de l'art, ID : 10670/1.dkednt
Le cinéma a inventé une forme entièrement nouvelle : le cadre mobile. Ayant la particularité d’être projeté sur un cadre fixe (l’écran), le cadre qui bouge par rapport à un environnement fictionnel lui-même en mouvement est un événement perceptif singulier, et évoque à la fois une médiation technique par le truchement d’un appareil de prise de vues et une mise en forme de l’image au moyen de la découpe active d’une portion d’espace. Cet essai s’intéresse au point de tangence de toutes ces déterminations : le point aveugle où prend forme un imaginaire de la technique cinématographique centré sur l’action de filmage, lequel va permettre la construction et le déploiement de mondes diégétiques.À partir d’une perspective psycho-anthropologique contemplant l’historicité et la matérialité des techniques de création et d’expression humaines par l’image, nous cherchons à comprendre le rôle original que joue l’appareillage machinique dans la fabrication et dans la perception de l’image cinématographique, jusque dans ses résonances symboliques et ses implications esthétiques. Le cadre mobile apparaît alors comme la manifestation par excellence d’une activité créatrice qui exprime une prise sur le monde par la technique, par la perception et par le symbole, indissociablement, et cette activité se cristallise en l’image de la « caméra », machine à filmer, à faire des « prises de vues ». En même temps, le cadre qui bouge est « juste » un effet d’image sur l’écran, sans lien sûr avec une technique matérielle donnée, mais capable de susciter une large gamme d’affects chez les spectateurs.