9 avril 2015
info:eu-repo/semantics/OpenAccess
Anne Pellus, « Des corps contemporains sous le voile », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.dzyylg
Depuis quarante ans déjà, la danse contemporaine s’est donné pour tâche de développer les possibles du corps par l’expérimentation de nouvelles corporéités déjouant toute codification. À cet égard, elle constitue une pratique émancipatrice et potentiellement subversive, le corps du danseur pouvant devenir un véritable "champ de bataille" où s’affrontent rapports de forces et idéologies. Comme le soulignait Michel Foucault, l’oppression porte toujours sur les "forces", non sur les "signes" et ce sont les forces psycho-sociales qui s’exercent sur les corps que les danseurs contemporains tentent de rendre visibles. Dans le champ de la danse contemporaine française, nous ferons l’analyse de deux créations des chorégraphes Héla Fattoumi et Éric Lamoureux: Manta (2009) et Lost in burqa (2011). Dans ces œuvres au carrefour de la danse, de la performance et des arts plastiques, il s’agit pour les interprètes d’expérimenter ce que le voile intégral islamique fait au corps en termes d’état, de mode de présence, de perception du temps et de l’espace, mais aussi de perturber les représentations que l’Occident se fait de la femme voilée. Dans notre analyse, nous montrerons comment s’invente une poétique du corps puisant dans l’imaginaire et le fantasmatique, une poétique qui interroge le rapport au corps féminin que nos sociétés contemporaines, orientales et occidentales, instituent et nous imposent, enfin, une poétique tournée vers un horizon d’émancipation politique.