29 septembre 2020
http://hal.archives-ouvertes.fr/licences/copyright/
Martin Vailly, « Le monde au bout des doigts : François Le Large, le globe de Coronelli et les cultures géographiques dans la France de Louis XIV », HAL-SHS : histoire, ID : 10670/1.e30uf2
Cette thèse explore la constitution de cultures géographiques parmi les courtisans et les élites du royaume de France à la fin du règne de Louis XIV, entre 1680 et 1720 environ. Mon analyse est principalement menée à partir de l’étude des globes terrestres de Vincenzo Coronelli, de leur circulation dans les cabinets curieux, ainsi qu’à partir des travaux de François Le Large, garde du globe du roi à Marly. J’interroge deux espaces différents, mais pourtant complémentaires, de la pratique géographique : la cour de Louis XIV, où une paire de grands globes cosmographiques est exposé, et les différents lieux du travail savant que sont les bibliothèques, les cabinets ou encore les jardins. En analysant à la fois la constitution de savoirs géographiques, leur exposition sur les globes, leur acquisition et leur discussion par les curieux de géographie, je montre la place de ces connaissances dans la vie sociale, politique et culturelle du royaume de France. À partir de l’étude de la persona savante et des travaux de François Le Large, je mets en évidence le lien entre la constitution d’une culture géographique, et les jeux de positionnement et d’ascension sociale, dans une démarche qui s’inscrit tant dans l’histoire sociale des sciences que dans l’anthropologie historique des pratiques savantes.En reconstruisant les sociabilités curiales qui s’articulent tant autour du grand globe de Coronelli que de l’acquisition d’une culture géographique, je montre que le goût pour ces savoirs est un enjeu tant politique que mondain, qui caractérise le roi savant, le bon courtisan ou le gentilhomme éduqué. Cette thèse révèle ainsi l’importance de ces objets de distinction sociale que sont les globes en général, et les globes terrestres de Coronelli en particulier. Ils sont au cœur d’un tissu de sociabilités savantes, mondaines et politiques, et forgent les imaginaires géographiques de leurs possesseurs. L’étude détaillée de la surface du grand globe terrestre de Louis XIV, et de son analyse par François Le Large, montre en outre la place des savoirs géographiques dans la symbolique du règne louis-quatorzien. La surface du globe participe à sa manière aux « guerres de plume » qui opposent Louis XIV et ses rivaux. Elle met en scène et légitime les ambitions impériales d’un souverain présenté comme protecteur des arts et sciences, dans ce lieu privilégié de son pouvoir absolu qu’est le palais de Marly.