1998
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Larbi Mekahli, « Évolution des Monts des Ksour (Algérie) de l’Hettangien au Bajocien. Biostratigraphie, sédimentologie, paléogéographie et stratigraphie séquentielle », Travaux et Documents des Laboratoires de Géologie de Lyon (documents), ID : 10670/1.e6a898...
Dans les Monts des Ksour (secteurs d'Aïn Ben Khelil, de Mékalis, d'Aïn Ouarka et du Kerdacha), les dépôts du Lias et du Dogger (Bajocien supérieur) ont été étudiés après une introduction consacrée aux caractères géographiques, géologiques et structuraux replacés dans le cadre global du domaine atlasique. La stratigraphie, précise et détaillée, est établie grâce à plusieurs coupes qui illustrent les formations (définies sur la base d'une nomenclature locale et hiérarchisée) et leurs variations dans les quatre secteurs. Cette stratigraphie repose sur le levé minutieux qui aboutit à une biostratigraphie assurée grâce à la récolte d'innombrables fossiles : ammonites, brachiopodes et foraminifères. Ainsi, une zonation précise a pu être basée sur les ammonites. Les principales découvertes sont les suivantes : - une ammonite (Caloceras sp.) a été découverte pour la première fois au sein de la «Dolomie du Chémarikh», ce qui permet de reconnaître la présence de l'Hettangien inférieur (zone à Planorbis) dans un ensemble qui n'avait jamais été daté ; - la faune d'Ermoceras du Bajocien supérieur (zone à Niortense) connue auparavant dans le Djebel Guettaï et Souiga a été retrouvée dans la coupe de la Raknet el Kahla (secteur d'Aïn Ouarka) ; - dans cette dernière coupe des niveaux chocolats à Hildaites, semblables à ceux connus au Portugal et dans le Moyen Atlas, sont identifiés ; - Pleuroceras gr. solare (Phillips) a été recueilli pour la première fois dans l'Atlas saharien. La sédimentologie est ensuite abordée sous l'angle analytique et séquentiel. L'étude des séquences, basée sur une définition rigoureuse des discontinuités sur le terrain, montre que les modalités d'installation et de dislocation de la plate-forme carbonatée, puis l'ouverture du sillon atlasique offrent un excellent exemple paléogéographique. Cette partie aboutit à un inventaire détaillé des différents faciès et des milieux correspondants qui se résume comme suit : - dans le secteur d'Aïn Ben Khelil, la sédimentation est de type plate-forme avec des périodes d'émersion (dorsale Hafid-Bou Rhenissa), et de milieu bassin (dorsale du Réha), où se déposent des faciès marno-calcaires d'omblic interrompus plusieurs fois par des produits de démantèlement transportés depuis la plate-forme voisine et resédimentés dans des conditions plus calmes ; - les secteurs de Mékalis et d'Aïn Ouarka, montrent l'évolution d'une plate-forme carbonatée qui subit une période d'approfondissement hétérochrone qui commence à se manifester dès l'Hettangien dans le deuxième secteur et à partir du Domérien dans le premier. Cet approfondissement se généralise dans les trois secteurs à partir du Toarcien et provoque la différenciation du sillon atlasique qui est bordé dans sa partie septentrionale par la plate-forme des Hautes-Plaines (dorsale Hafid-Bou Rhenissa, dans le secteur d'Aïn Ben Khelil) et dans sa partie méridionale par celle du Kerdacha et par la plaine saharienne. La stratigraphie séquentielle a été abordée en utilisant les résultats stratigraphiques, les données de terrain, l'interprétation séquentielle et le milieu de sédimentation. Cette méthodologie a montré que l'interprétation relevant de la stratigraphie séquentielle s'appuie essentiellement sur les bases précédentes et ne doit pas les contredire. Les résultats et la comparaison avec la charte de Haq et al. (1987) nous ont conduit aux conclusions suivantes : - l'application de la stratigraphie séquentielle dans le contexte carbonaté consiste à reconnaître, rigoureusement, sur le terrain, l'empilement vertical des différentes séquences ; - les cortèges reconnus d'affleurement en affleurement ne sont pas identiques partout, probablement à cause de la situation paléogéographique (domaine de plate-forme, de transition ou de bassin). Cela amène à considérer que la géométrie des séquences de dépôts du Jurassique, dans notre région d'étude, est étroitement guidée par les phénomènes tectono-sédimentaires et non par l'eustatisme seulement ; - la comparaison avec cette charte, démontre que les différents cortèges de dépôt reconnus dans notre étude ne coïncident que rarement et approximativement avec ceux du diagramme des cycles eustatiques. Notons, par exemple, que le cortège de bas niveau (LSW) identifié dans la charte au niveau de la limite Opalinum-Murchisonae ne ressort pas dans notre étude. Cette différence est liée aux influences tectoniques régionales, aux variations de la vitesse de subsidence et aux conditions d'établissement de la charte. Les contrôles de la sédimentation semblent donc être liés principalement aux phénomènes tectoniques qui induisent des variations très locales du niveau marin. Cette hypothèse est appuyée par le fait que les événements sédimentaires sont, soit décalés dans le temps, soit caractérisés par des inversions de situation paléogéographique (fermeture du sillon à la fin du Bajocien dans l'Atlas saharien et enfoncement dans le domaine tlemcénien à la même époque). L'évolution paléogéographique de l'Atlas saharien débute par les premières phases de distension triasiques. À cette époque on assiste aux épanchements basaltiques et aux intrusions doléritiques. - À la fin du Trias et au début de l'Hettangien, la subsidence très forte est compensée par une grande productivité d'apports sédimentaires essentiellement carbonatées. Il se développe alors une plate-forme carbonatée (plate-forme initiale) qui peut subir des émersions dans les secteurs d'Aïn Ben Khelil et de Mékalis (axe Souiga-Melah). Cette plate-forme subit ensuite une dislocation qui donnera naissance à un étroit sillon dont l'ouverture est hétérochrone d'une région à l'autre. - Au Sinémurien, alors que l'enfoncement s'accélère à Chémarikh (secteur de l'Aïn Ouarka), on note que les autres secteurs sont encore résistants et marquent la présence d'une sédimentation de plate-forme interne. - Au Pliensbachien (Lias moyen), la subsidence de grande ampleur de l'époque précédente semble se ralentir. Les dépôts se caractérisent par une sédimentation de plate-forme carbonatée externe influencée à la fin par des faciès condensés de type «ammonitico-rosso». Ces faciès de pente marquent, par endroit, le début d'une paléogéographie nouvelle (sillon atlasique au niveau du secteur de l'Aïn Ouarka). - Le Toarcien (Lias supérieur) est caractérisé par l'apparition, dans les secteurs de l'Aïn Ouarka, de Mékalis et d'Aïn Ben Khelil (Réha), de dépôts de bassin perturbés par la resédimentation de dépôts de haute énergie (Djebel er Réha) remobilisés à partir de zones résistantes ou par des éléments bréchiques en relation avec les apports détritiques qui augmentent plus tard en amorçant une progradation deltaïque. Ailleurs, dans la dorsale Hafid-Bou-Rhenissa et dans le secteur du Kerdacha, la subsidence est moindre et on observe un retour à la sédimentation de plateforme interne. - Pendant l'Aalénien, les brèches synsédimentaires deviennent plus nombreuses. On a l'arrivée des premiers apports gréseux (secteurs d'Aïn Ouarka et de Mékalis), alors que dans le secteur de Aïn Ben Khelil s'effectue un retour aux conditions initiales de plate-forme interne. - Au Bajocien des apports détritiques terrigènes apparaissent dans tous les secteurs avec de temps à autre des périodes d'approfondissement. À partir de cette époque, le sillon atlasique commence à se combler, ce qui annonce sa fermeture.