2020
Cairn
Matthieu Calame et al., « Quelles techniques pour l’agriculture écologique ? », La Pensée écologique, ID : 10670/1.exy9a6
L’industrialisation des activités humaines repose sur l’automatisation des fonctions, donnant aux machines-outils un rôle central. Leur acquisition, la maximisation de leur usage et leur entretien reconfigurent la production en subordonnant les autres acteurs et facteurs au service de la machine. L’agriculture en offre un exemple éclairant. Dans un premier temps l’introduction des machines conduit à une reconfiguration de l’espace – le remembrement – du travail – spécialisation des agriculteurs et des territoires. Dans un deuxième temps les espèces domestiques sont-elles mêmes sélectionnées pour s’adapter à la machine et les chaînes de valeur sont reconfigurées par une hyperspécialisation en bassins de production parfois planétaires. La comparaison entre système d’élevage à l’herbe et système d’élevage à base de maïs ensilage – ce dernier impliquant matériel lourd, génétique oligopolistique, importation de soja et développement d’infrastructures portuaires – illustre deux voies agronomiques, une voie Low-Tech plus autonome et une voie high-tech. Ces deux voies présentent également deux conceptions différentes de la performance. Le coût élevé des High-Tech et la nécessité économique de retour sur investissement conduit systématiquement à sacrifier les composantes écologiques, territoriales et humaines. Mais si la High-Tech semble incompatible avec le développement d’une agriculture écologique, l’adoption de Low-Tech ne suffit pas. Un espace hyperconcurrentiel dérégulé conduit à une insécurité économique des acteurs qui favorise les comportements prédateurs. L’adoption de pratiques et de techniques au service d’une agriculture écologique est inséparable de la mise en place des régulations appropriées. L’histoire agricole, que ce soit en matière de foncier, d’eau, ou de ressources biologiques en présente de nombreux exemples.