ORDRE OU DESORDRE DANS LA NARRATION BIBLIQUE ?

Résumé En Fr

The chronological sequencing of the elements of a narrative or of larger ensembles is one of the essential marks of the biblical framework. But it can sometimes surprise to the point of tempting the commentator to rearrange the elements to make the narratives more plausible or logical from his point of view. Our study focuses on a few pericopes to show that the order of the elements is not the result of errors or clumsiness, but serves to convey theological or spiritual messages. Thus the agony of Jesus in Gethsemane in Luke, the fear of the disciples at the Transfiguration in Matthew, the resurrection of the saints at the death of Jesus in the same Matthew, and then in the first chapter of Genesis the inversion of animal species between the divine word that utters it and its fulfillment are studied. In the few verses that engage in action leading to unbridled violence in Shechem (Gen 34), the interpretation of several verbs depends on the appreciation of Šeḵem's actions, which makes us note the cultural shifts separating the social and religious context of biblical Israel from our contemporary Western societies. Finally, our study will be broadened to include larger pericopes or ensembles, to reflect on the position of the narrative and prescriptions of the Passover that the children of Israel celebrate before leaving Egypt, and then of the giving of the Law at Sinai in the book of Exodus. We will conclude that the reader must travel to enter other worlds with their own logics in order to discover elements of meaning that he can then repatriate to his own situations. The disorders that have been identified, or that appear as such at first, require a respectful exegesis of the received text in order to seek a meaning whose strangeness, properly understood, can be very enlightening for contemporary interpreters.

La mise en séquence chronologique des éléments d’un récit ou d’ensembles plus vastes constitue l’une des marques essentielles de la trame biblique. Mais elle peut parfois surprendre jusqu’à tenter le commentateur de réorganiser les éléments pour rendre les récits plus plausibles ou logiques de son point de vue. Notre étude s’attache à quelques péricopes pour montrer que l’ordre des éléments ne résulte pas d’erreurs ou de maladresses, mais sert à transmettre des messages théologiques ou spirituels. Sont ainsi étudiés l’agonie de Jésus à Gethsémani chez Luc, la crainte des disciples à la Transfiguration chez Matthieu, la résurrection des saints à la mort de Jésus chez le même Matthieu, puis au premier chapitre de Genèse l’inversion des espèces animales entre la parole divine qui l’énonce et son effectuation. Dans les quelques versets qui engagent une action menant à une violence débridée à Sichem (Gn 34), l’interprétation de plusieurs verbes dépend de l’appréciation des actions de Šeḵem qui fait prendre acte des déplacements cultures séparant le contexte social et religieux de l’Israël biblique de nos sociétés contemporaines occidentales. Enfin, notre regard s’élargira à de plus vastes péricopes ou ensembles, pour réfléchir sur la position du récit et des prescriptions de la Pâque que les fils d’Israël célèbrent avant de quitter l’Égypte, puis du don de la Loi au Sinaï dans le livre de l’Exode. Nous conclurons au nécessaire déplacement requis du lecteur pour entrer dans d’autres mondes possédant leurs logiques propres afin d’y découvrir des éléments de sens qu’il pourra ensuite rapatrier dans ses propres situations. Les désordres repérés, ou qui apparaissent d’abord comme tels, requièrent une exégèse respectueuse du texte reçu pour chercher un sens dont l’étrangeté bien comprise peut être fort éclairante pour les interprètes contemporains.