De l'honneur de la corporation à l'honneur de la patrie : Les étudiants de Göttingen dans l'Allemagne de la Première Guerre mondiale

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2001

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Marie Vincent, « De l'honneur de la corporation à l'honneur de la patrie : Les étudiants de Göttingen dans l'Allemagne de la Première Guerre mondiale », Le Mouvement Social, ID : 10670/1.f82e8f...


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Résumé En Fr

From the corporation to the motherland : the honour of Göttingen’s students in First World War Germany. Göttingen University provides a privileged prism for the observation of German student corporations at the end of the Empire. Their social recruitment is exclusive and they are characterized by a certain ethics, so they aim at making their members true men of honour. One of the foundations of the « corporate education » is more particularly the necessity of a duel in case of offence. As they put forth the patronage of the younger by the senior boys, and pave the way to professional and social life, the student corporations can be seen as a whole recruitment system, which shapes the German elite. The celebration of the centenary of the battle of Leipzig in 1913 commemorates the victory of the German people against Napoleon and generates a revival of the students’ patriotism: thus, they massively volunteer to join the army in August 1914. World War I is an opportunity for them to put into practice the values of their corporate commitment. The war appears as an international duel, in which the point is to re-establish the allegedly outraged honour of Germany. The way they live through the conflict can be reconstituted thanks to the letters from the front line and the war journals published within the corporations. The necessity of being exemplary on the front line seems to be considered by the students as a duty towards their corporation, with which most of them keep contact. But as they have to face the mere reality of the conflict, they get through harsh disillusion. From 1916, their traditional vision of martial heroism seems to be archaic in the context of the trenches. Indeed, the students still feel they belong to an elite in their military divisions, but this can only be acknowledged from an ethical point of view. The trauma of a defeat which is largely attributed to « the non-operational zone » leads them to reject the Weimar Republic as early as 1918. Thus they see the student corporations as the spear-head of a restoration of the « true German patriotism».

L’Université de Göttingen fournit un prisme privilégié d’observation des corporations étudiantes allemandes à la fin de l’Empire. De recrutement social fermé et caractérisées par une certaine éthique, ces dernières veulent faire de leurs membres de véritables hommes d’honneur. Un des fondements de « l’éducation corporative » est notamment la nécessité de réparer l’honneur individuel par les armes en cas d’offense. Proposant la protection des anciens envers les plus jeunes et préparant les étudiants à leur vie tant professionnelle que sociale, les corporations étudiantes peuvent être envisagées comme système de recrutement et de formation des élites allemandes. La célébration du centenaire de la bataille de Leipzig en 1913 commémore la victoire du peuple allemand contre Napoléon et réactive le patriotisme des étudiants : ces derniers s’engagent ensuite massivement dans l’armée comme volontaires en août 1914. La Première Guerre mondiale est l’occasion pour eux de mettre directement en pratique les valeurs de l’engagement corporatif. La guerre apparaît comme un commerce de l’honneur au niveau international, où il convient de réparer l’honneur de l’Allemagne que l’on croit outragé. La manière dont est vécu le conflit peut être reconstituée à partir de lettres du front et de journaux de guerre internes aux corporations : l’exigence de se montrer exemplaires au front apparaît pour les étudiants comme un « devoir » envers leur corporation avec qui ils restent majoritairement en contact. Mais confrontés à la réalité du conflit, ils connaissent des désillusions à partir de 1916 et déchantent face à une conception traditionnelle de l’héroïsme guerrier qui semble archaïque dans la guerre de tranchées : si les étudiants ont toujours le sentiment de former une élite au sein de leurs divisions militaires, celle-ci ne peut être que d’ordre moral. Le traumatisme d’une défaite largement imputée à « l’arrière » les conduit à désavouer la République de Weimar dès 1918 et à considérer les corporations étudiantes comme fers de lance d’une restauration de la « vraie patrie allemande ».

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