25 juin 2021
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Jean-Claude Milner, « Narrativité, rupture et révolution », HAL-SHS : histoire, philosophie et sociologie des sciences et des techniques, ID : 10.4000/lrf.4863
La Révolution française a suscité très tôt une multiplicité de récits qui ne se bornaient pas à rapporter la totalité des événements, mais tentaient également à en exposer les causes « réelles ». Ces récits différaient profondément les uns des autres, mais leur ambition était analogue. Le présent article se propose de montrer que la notion de « grand récit », introduite par Jean-François Lyotard, permet de saisir les traits communs de ces divers travaux.On connaît les critiques que François Furet a adressées aux historiens français de la Révolution ; elles se laissent résumer comme suit : au lieu de substituer un nouveau grand récit aux récits antérieurs, Furet rejette le grand récit comme tel. De ce point de vue, il s’inscrit dans un mouvement de grande ampleur. Avant lui, Claude Lévi-Strauss avait dressé un parallèle entre les grands récits des sociétés occidentales et les mythes qu’il avait étudiés dans les sociétés amazoniennes. Indépendamment de Furet, Michel Foucault exprime sa défiance à l’encontre des « grands récits » hérités.Dans ces conditions, une série de questions se pose : les historiens peuvent-ils éliminer toute possibilité de grand récit ? Un tel rejet implique-t-il que les micro-récits sont seuls capables de rendre compte des événements passés ? Implique-t-il l’échec inévitable de toute tentative visant à aller au-delà de la pure et simple juxtaposition des descriptions ? Le présent article tente, dans sa conclusion, de résoudre ces difficultés.