2020
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Yves Lehmann et al., « Du bon médicament selon Marcellus Empiricus (IVe siècle apr. J.-C.) : préparation, présentation, prescription », Revue d'Histoire de la Pharmacie, ID : 10670/1.fxnfhm
Force est de rappeler que le gros manuel de remèdes pratiques De medicamentis rédigé par Marcellus de Bordeaux s’inscrit dans la tradition scientifique d’un Scribonius Largus et d’un Dioscoride consistant à utiliser de nombreuses plantes indigènes. Ce qui n’empêche pas l’Aquitain, dans le traitement des varices par exemple, de recommander comme alternative à l’opération la prise de médicaments préventifs ou curatifs qui sentent les recettes de bonne femme. Par ailleurs, le thérapeute gaulois reste fidèle à une conception généraliste, syncrétiste, de la médecine. C’est ainsi que Marcellus, célèbre surtout comme ophtalmologue, pratique néanmoins toutes les médications. Au premier rang des actions thérapeutiques préconisées par Marcellus de Bordeaux se trouve le recours au bain médical et à ses annexes. Il reste que pour le médecin pharmacien Marcellus, féru de science des remèdes et des médicaments, la préoccupation essentielle réside dans l’art de les composer et de les contrôler. Or la réalisation des préparations médicamenteuses nécessite une connaissance fine des poids et des capacités ainsi que de leur combinaison. Encore convient-il de préciser le classement fonctionnel des médicaments chez Marcellus de Bordeaux. Conçus comme des «auxiliaires du corps» , liés au système des «traitements» , les médicaments ou les thérapeutiques courantes répondent d’après lui à une physiologie générale de la maladie et de la santé. Et de fait, chez Marcellus Empiricus, la catégorie médicamenteuse se trouve définie par sa fonction «attractive-répulsive». Quant à la présentation des médicaments par Marcellus, elle est liée évidemment au mode d’administration et à la technique de composition, selon que le remède est administré par la voie orale ou par la voie rectale, ou qu’on applique une médication «externe» sous forme de cataplasmes ou d’emplâtres. Dans la pharmaceutique de l’oculiste bordelais Marcellus Empiricus – d’une richesse immense, que les historiens de la médecine romaine prétendent parfois «sélective» – on retiendra surtout quelques collyres, ces médicaments topiques appliqués sur l’oeil. Mais on s’interrogera aussi sur la mention par Marcellus, à côté de spécialités fondamentales, d’autres nettement marginales et qui ressortissent au charlatanisme le plus échevelé. Il convient enfin d’intégrer la problématique marcellienne du bon médicament dans une perspective résolument élargie – celle d’un plaidoyer pour une éthique hippocratique de la médecine.