19 novembre 2020
Guillaume Jomand, « Féminisation de la lutte sportive (1971- début XXIème siècle) : pratique, représentations et institutions », HAL-SHS : histoire, ID : 10670/1.gjatz4
La lutte est largement considérée comme une activité dite masculine mais uneféminisation de ce sport au cours des dernières décennies a donné lieu à un style uniqueappelé « lutte féminine ». L’élaboration d’une lutte spécifique aux femmes révèle des rapportshiérarchiques au sein des pratiques sportives d’une même institution. Le processus deféminisation, mais aussi le concept de genre, nous permettent de questionner cetteconstruction de la lutte féminine comme style officiel au sein de l’institution sportive.La région Nord-Pas-de-Calais, en France, apparaît comme étant le principal lieu denaissance de la lutte pratiquée par des femmes en 1971, non seulement au niveau nationalmais aussi à l’international. Cette ouverture de la pratique sportive a été catalysée par la FSGT,qui a su proposer un espace de pratique en amont de la FFL, alors que le champ scolaire offraitune ouverture similaire au monde fédéral. Cette constitution en France dans le champ fédérals’est faite en conservant une conception essentialisante, se référant au mythe de la fragilitéet de la beauté, qui a favorisé l’élaboration de ce style unique.En effet, l’intégration au sein de la FFL et de la FILA/UWW a suscité des débats sur lamanière de les accepter, de les intégrer. Il est donc nécessaire d’identifier quand et commentelles ont été prises en compte par l’institution, comment la pratique s’est développée, s’estdiffusée au sein des instances fédérales. L’analyse quantitative des licences permet demontrer la croissance à laquelle s’ajoute un regard qualitatif à travers l’occupation desdifférents statuts au sein du mouvement sportif : lutteuses, lutteuses de haut-niveau,dirigeantes, arbitres. Ce rayonnement est disparate, des points d’évolution sont signalés,notamment dans la prise en compte des lutteuses de haut-niveau, et des résistancesapparaissent. L’analyse des plans de féminisation permet de souligner les initiatives mises enplace pour lutter contre cette dissymétrie que le sport entretient dans les rapportsfemmes/hommes. L’Olympisation de ce style apparaît comme un point d’orgue de laféminisation de la lutte sportive tout en étant le révélateur d’une nécessité pour la lutte derester olympique.La lutte pratiquée par des femmes demeure donc toujours en tension entreacceptation, ouverture mais aussi assignation, contrôle et soumission à l’ordre sportif et à seshiérarchies masculines.