En marge des institutions : les voix(es) de l'intime. Surréalisme, exil et expérience féminine (1940-1970)

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En 1940, les conflits de la seconde guerre mondiale et l’exil de nombreux artistes surréalistes européens sur le continent américain inaugurent au Mexique une convergence tumultueuse et féconde du nationalisme postrévolutionnaire mexicain et de l’internationalisme des avant-gardes européennes. Malgré un renouveau de la scène artistique locale, l’intégration est difficile pour la communauté d’artistes exilés qui se confronte à l’hégémonie de l’École mexicaine de peinture, dominée par l’ombre de ceux que l’on nomme les « Trois grands » : Diego Rivera, David Alfaro Siqueiros et José Clemente Orozco. Parmi cette communauté de surréalistes en exil, les artistes femmes –Leonora Carrington, Remedios Varo, Alice Rahon, Kati Horna et Bridget Tichenor– subissent une double marginalisation des canaux artistiques traditionnels, en tant qu’exilées et en tant que femmes. Entre idéalisation et rejet, il leur est encore difficile voire impossible de mener une carrière artistique indépendante et professionnelle. Reléguées en marge des institutions publiques de l’époque, ces artistes vont investir l’espace privé afin de renégocier leur rôle et leur voix dans un microcosme culturel principalement dominé par les hommes. Elles opèrent dès lors un « renversement » –tel que théorisé par Gayatri Spivak – de l’association traditionnelle de la femme à la sphère domestique. Le foyer est envisagé comme un sujet iconographique ainsi qu’un espace de création et d’expression alternatif à l’origine d’une nouvelle forme de sociabilité spécifiquement féminine. L’objectif de cette intervention est ainsi d’étudier les mécanismes de cette réappropriation en vue d’une émancipation et d’une affirmation, depuis les marges, sur la scène culturelle locale.