Le luxe du silence: Silences subis, silences choisis et silences impossibles parmi leslettrés de l’Ouzbékistan soviétique durant le second stalinisme (1945-1953)

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6 janvier 2023

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Benjamin Quénu, « Le luxe du silence: Silences subis, silences choisis et silences impossibles parmi leslettrés de l’Ouzbékistan soviétique durant le second stalinisme (1945-1953) », HAL-SHS : histoire, ID : 10670/1.go36sh


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Résumé En Fr

This study sheds new light on the cultural history of second Stalinism by examining the silences observed by writers in Soviet Uzbekistan from 1945 to 1953 while Soviet powers were multiplying contradictory constraints. During this period, the central authorities sought to regain control over Soviet Uzbekistan, which had become very autonomous during the ‘Great Patriotic War’, first facing the cohesion of local institutions (1945-1949), then with an increased violence mirroring the anti-cosmopolitan campaign, that succeeded in cracking the local solidarities within the political and creative elites (1949-1952).The repression that affected academics and writers led to a rapid erosion of scientific and literary production, as well as of any form of expression of a non-Russian national culture, in a paroxysmal narrowing of the literature. While the injunction to produce and speak on behalf of the people did not disappear, silence appeared sometimes as the internalisation of this constraint, sometimes as resistance, or even an act of protest.The study of six writers’ careers reveal that silence could be also a luxury. Indeed, while the repressive episode affected a few leading figures, such as the poet Oybek (1904-1968), who was removed from the leadership of the Writers’ Union in 1949 and then physically silenced by the after-effects of his interrogation, it primarily affected young writers who had to produce or risk being reduced to poverty and silence at the same time. The strategy of resistance through silence would therefore be the privilege of more established figures, such as the novelist Abdulla Qahhor (1907-1968), who went so far as to suspend his translation of Russian literature without being bothered. For others, silence seems impossible, while writing is as dangerous as mandatory.

La présente étude propose un nouvel éclairage de l’histoire culturelle du second stalinisme à travers l’étude des silences observés parmi les écrivains de l’Ouzbékistan soviétique de 1945 à 1953, dans un contexte où les contraintes, parfois contradictoires, se multiplient. Au cours de cette période, le pouvoir central cherche en effet à reprendre la main sur cette périphérie devenue très autonome au cours de la « Grande Guerre patriotique », d’abord avec de grandes difficultés face à la cohésion des institutions locales (1945-1949), puis avec une violence qui parvient à fissurer les solidarités au sein des élites politiques et créatrices (1949-1952) en même temps qu’elle se modèle sur la campagne anticosmopolite.La répression qui touche alors universitaires et écrivains aboutit à un étiolement rapide de la production scientifique et littéraire, ainsi que de toute forme d’expression d’une culture nationale non-russe dans un étrécissement paroxystique du champ du dicible. Alors que l’injonction à produire, à prendre la parole au nom du peuple ne disparaît pas, le silence apparaît tantôt comme l’intériorisation de cette contrainte, tantôt comme une résistance, voire un acte de contestation.Au regard de six parcours d’écrivains, il apparaît que le silence est également un luxe. En effet, si l’épisode répressif frappe quelques grandes figures, comme le poète Oybek (1904-1968), démis de la direction de l’Union des Écrivains en 1949, puis physiquement réduit au silence par une pression telle que son corps le trahit, il touche en priorité de jeunes auteurs qui ont nécessité de produire sous peine d’être réduits à la misère en même temps qu’au silence. La stratégie de résistance par le silence serait donc le privilège de figures plus installées, comme le romancier Abdulla Qahhor (1907-1968), qui va jusqu’à suspendre ses activités de traduction de la littérature russe sans être inquiété. Pour d’autres, ce silence semble impossible, alors même que la prise de parole est aussi dangereuse qu’obligatoire.

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