De l’unité à la division. Comment la jalousie a contribué à l'échec du capitalisme familial ? Le cas des entrepreneurs du peigne en Pays d'Olmes, au pied des Pyrénées

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Bruno Evans, « De l’unité à la division. Comment la jalousie a contribué à l'échec du capitalisme familial ? Le cas des entrepreneurs du peigne en Pays d'Olmes, au pied des Pyrénées », HAL-SHS : histoire, ID : 10.3917/eh.091.0082


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Le Pays d'Olmes, à une centaine de kilomètres au sud de Toulouse, est un territoire de piémont dont la pauvreté des terres a, de longue date, poussé ses habitants à recourir à des compléments de revenus, en particulier industriels. Outre la sidérurgie et le textile, il produisait des bijoux en jais et des peignes. Loin d'être anecdotiques, ces activités connurent un bel apogée : vers 1750, les exportations de jais dépassaient les 500 000 livres et, en 1929, la production de peignes atteignait les 30 millions. Mais chacune de ces industries-avec les guerres napoléoniennes pour le jais et la crise des années 1930 pour le peigne-déclina ensuite jusqu'à la quasi extinction. À l'instar de nombreux autres territoires ruraux, leur réussite reposa grandement sur des entreprises familiales qui surent gérer les affaires en commun et tisser des réseaux sur la longue durée. Mais la gestion familiale implique aussi une fragilité structurelle : la nécessaire entente au sein des familles d'entrepreneurs. C'est pourquoi, au coeur de leur échec, réside un facteur longtemps sous-estimé par les historiens de l'économie en raison de leur préférence pour des données plus aisément quantifiables : les affects. Dans le cas du Pays d'Olmes, des sources, principalement privées rendent intelligibles le rôle des émotions dans l'échec du capitalisme familial. La communauté protestante des villages de Léran, Le-Peyrat et La-Bastide-sur-l'Hers s'y spécialisa dans la fabrication de bijoux en jais et de peignes. Du XVIII e siècle aux années 1840, elle fut soudée par des valeurs communes : le travail, la religion réformée ainsi que des idées libérales et républicaines. En raison de sa faiblesse démographique, les renchaînements d'alliances y furent nombreux. De plus, le système productif incorporait les différentes branches d'une même famille. L'unité de cette communauté, permettant de passer outre les affects négatifs, fut un facteur important de la réussite économique du territoire. Avec la mécanisation et une plus grande ouverture au monde, les années 1840 marquèrent l'amorce d'une nouvelle ère de l'industrie du peigne. Le capitalisme familial, moteur de cet essor économique, atteint alors son apogée. Cependant, ce développement fut inégal : à lui seul, Léo Bez produisait cinq millions de peignes pour un chiffres d'affaires de plus de 800 000 francs. Le succès de Léo Bez fit des envieux, à telle enseigne que son représentant sur la place parisienne lui écrivait : « vous ferez crever de rage tous ces jaloux autour de vous qui voudraient bien vous voir à 100 lieux sous terre quoique parents » 1. Ainsi avait émergé une émotion fortement négative, la jalousie. Désormais, les principaux entrepreneurs, tous apparentés se divisèrent. Les rivalités familiales, largement motivées par la jalousie, entraînèrent une lutte interne dans laquelle tous les coups furent permis et constituèrent un élément important du déclin d'un capitalisme familial séculaire. S'il faut bien sûr se 1 Archives privées Bez-de Faucher, lettre d'Élie Cerf (Paris) à Léo Bez (La-Bastide-sur-l'Hers), 19 mai 1871.

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