2016
Cairn
Pascal Bastien, « Guyton de Morveau, juriste : réformes judiciaires et unification du droit, 1770-1804 », Annales historiques de la Révolution française, ID : 10670/1.h0eits
Les décennies 1770 et 1780 constituent un moment privilégié pour réfléchir à la réforme du droit et des procédures judiciaires à l’échelle des Lumières européennes. Porté sous différentes formes dans la péninsule italienne ou dans les frontières du Saint-Empire, le réformisme judiciaire s’inscrit, dans la France de Louis XV et Louis XVI, dans le cadre assez circonscrit de la procédure criminelle et du droit pénal. La justice civile, en effet, n’a pas connu le même processus de centralisation et d’uniformisation que celui qui a traversé la justice criminelle depuis le XVIe siècle. Objet étrange et fragmenté, le domaine du droit privé, divisé en pays de droit écrit et de droit coutumier, semble résister à l’utopie des grands projets des Lumières. Avant de connaître une belle réputation de scientifique et de républicain des lettres, Guyton de Morveau fut d’abord avocat général au Parlement de Bourgogne et, à travers ses Éloges et Discours, fut l’un des rares juristes à proposer et à défendre une unification complète du droit privé. Réformateur d’un autre genre, Guyton de Morveau s’attaqua aux libertés qu’incarnaient les particularismes locaux, dénonça l’archaïsme et la division du droit coutumier, et contribua à l’élaboration d’un projet d’unification du droit privé qui n’aboutit finalement que sous le Consulat, contre la méfiance des philosophes et les échecs des révolutionnaires.