L’impossible asile. La maison des aliénés de Corsier (1832-1838)

Résumé Fr En

Entre 1832 et 1838, dans le village de Corsier à proximité de Genève, une bâtisse rurale est transformée en établissement public pour aliénés. Passée sous silence ou considérée comme une simple parenthèse par l’historiographie de la conquête asilaire en Suisse, cette expérience est modeste par sa durée et par sa taille. Elle illustre pourtant de manière condensée les obstacles, les échecs et les hésitations qui entourent, dans la première moitié du xixe siècle, la création d’établissements spécialisés dans le domaine de la maladie mentale. La maison de Corsier est exemplaire de ce temps où les savoirs, les acteurs et les lieux de la psychiatrie naissante sont largement indéterminés, où le monopole médical sur la folie est même une lointaine chimère. Le choix de s’établir à Corsier n’est pas le produit des circonstances sanitaires – l’épidémie de choléra menace la Suisse – mais le résultat d’une conception de l’aliénation mentale nouant l’ambition thérapeutique aux exigences d’ordre public et de gestion administrative de l’anormalité psychique ou sociale. Dans sa forme et son mode de fonctionnement, la maison de Corsier est l’un de ces lieux de folie mal circonscrits, parmi d’autres en Suisse et en Europe, entre l’hôpital général et l’asile.

Between 1832 and 1838, in the village of Corsier near Geneva, a rural building was transformed into a public establishment for the insane. This experience, which has been passed over in silence or regarded as a mere parenthesis by the historiography of the asylar conquest in Switzerland, is modest in terms of its duration and size. However, it provides a condensed illustration of the obstacles, failures and hesitations surrounding the creation of specialised institutions for the mentally ill in the first half of the 19th century. Corsier’s house is exemplary of a time when the knowledge, actors and locations of the nascent psychiatry were largely undetermined, when the medical monopoly on insanity was even a distant chimera. The choice to settle in Corsier was not the product of health circumstances - the cholera epidemic is threatening Switzerland - but the result of a conception of mental alienation that links therapeutic ambition to the requirements of public order and the administrative management of psychological or social abnormality. In its form and mode of operation, Corsier’s house is one of those places of madness, among others in Switzerland and Europe, between the general hospital and the asylum.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines

Exporter en