Dans le débat actuel sur le premier épisode psychotique, ce que l’on appelle les psychoses émergentes, il nous paraît pertinent d’évoquer la notion de « psychose naissante » qui semble actuellement tombée dans l’oubli. Henri Grivois a décrit ce concept dans les années 90 et a proposé plusieurs versions de sa théorisation que nous décrirons. Dans une première approche, Grivois se place dans une perspective phénoménologique. Il décrit l’expérience vécue du malade dans laquelle ce dernier est en proie au « concernement » et à la centralité. Le concernement, néologisme emprunté au travail de Jean Starobinski sur Rousseau, constitue le symptôme initial. Même si chacun de nous peut y être confronté peu ou prou, dans la psychose naissante il s’emballe et devient centralité avec polarisation du monde autour du sujet. « Le carburant de la psychose c’est les autres ». À ce stade, Grivois exclut tout déterminisme : génétique, moléculaire ou psychanalytique, même s’il concède, fidèle à l’abord phénoménologique, qu’il existe dans tous les cas une rupture amoureuse ou des situations de perte brutale d’identité. Sous l’influence des philosophies de l’esprit, Grivois adopte pour un temps un modèle cognitiviste, puis il revient à une conception plus classique dans laquelle la psychose naissante serait le premier épisode psychotique. La psychose naissante servirait ainsi d’une part, de tronc commun aux différentes psychoses et d’autre part, se trouve régie par le modèle vulnérabilité-stress. Ce modèle fait intervenir des facteurs génétiques mais qui restent inopérants sans l’association avec des facteurs individuels et environnementaux pour que la psychose apparaisse.Grivois fait aussi un rapprochement entre la psychose naissante et la schizophrénie débutante.Il est important de reconnaître les premiers signes d’apparition de la psychose afin de débuter un traitement le plus précocement possible. On sait que la durée de psychose non-traitée est un facteur important à prendre en compte.
Nascent psychosis according to Henri GrivoisIn the current debate surrounding the concept of first psychotic episode, or emergent psychosis, it seems relevant to review the notion of “nascent psychosis,” which has apparently been forgotten. Henri Grivois described this concept in the 1990s and offered several versions of his theory, which we will describe. In his first approach, Grivois adopts a phenomenological perspective. He describes the lived experience of the patient, who is a victim of “concernment” and centrality. Concernment, a neologism borrowed from work done by Jean Starobinski on Rousseau, is the initial symptom. Even though each of us may have to deal with this to some degree, in nascent psychosis it gets out of control and becomes centrality with the polarization of the world around the subject. “The fuel of psychosis is other people.” At this stage, Grivois excludes any form of determinism: genetic, molecular, or psychoanalytical, even though he does concede, in line with his phenomenological approach, that in all cases there is a broken relationship or situations involving the abrupt loss of identity. Influenced by philosophies of mind, Grivois then adopts a cognitive model for a period of time but returns to a more traditional view according to which nascent psychosis is claimed to be the first psychotic episode. Nascent psychosis could thus, on the one hand, serve as a common thread to various psychoses and, on the other, is regulated by the vulnerability-stress model. This model involves genetic factors, but they remain inoperative if they are not associated with individual and environmental factors for the psychosis to appear.Grivois also connects nascent psychosis with the onset of schizophrenia.It is important to recognize the first signs of psychosis in order to begin treatment as early as possible. We know that the length of time psychosis goes untreated is an important factor to consider.
ResumenHenri Grivois ha descrito este concepto en los años 90 y propuesto varias versiones de su teorización que vamos a describir. En un primer enfoque, Grivois se sitúa en una perspectiva fenomenológica. Describe la experiencia vivida por el enfermo en la que el último está preso del “concernimiento” y a la centralidad. El concernimiento, neologismo tomado prestado del trabajo de Jean Starobinski sobre Rousseau, constituye el síntoma inicial. Aunque cada uno de nosotros puede estar enfrentado más o menos con él, en la psicosis incipiente se dispara y se convierte en centralidad con polarización del mundo entorno al sujeto. “El carburante de la psicosis, son los demás seis”. A estas alturas, Grivois excluye cualquier determinismo: genética, molecular o psicoanalítica, aunque conceda, fiel al enfoque fenomenológico, que existe en todos los casos una ruptura amorosa o situaciones de pérdida brutal de identidad. Bajo la influencia de las filosofías del espíritu, Grivois adopta para cierto tiempo un modelo cognitivista, y luego vuelve a una concepción más clásica en la que la psicosis incipiente sería el primer episodio psicótico. Psicosis incipiente serviría así por una parte de tronco común a las diferentes psicosis y por otra parte, se encuentra regida por el modelo vulnerabilidad-estrés. Este modelo hace intervenir factores genéticos pero que se mantienen en la inoperancia sin la asociación con unos factores individuales y ambientales para que aparezca la psicosis.Grivois también procede a un acercamiento entre la psicosis incipiente y la esquizofrenia incipiente. Es importante reconocer las primeras señales de aparición de la psicosis con el fin de iniciar un tratamiento lo más precoz posible. Se sabe que la duración de la psicosis sin tratar es un factor importante a tomar en cuenta.
